Carnets rouges n° 25 - L’école et son « dehors » : quels savoirs pour quelle égalité ?

L’ouverture de l’école semble relever du bon sens, et pourtant recouvre des finalités divergentes, que ce numéro de Carnets rouges interroge afin d’en identifier les enjeux.

Qu’en est-il de cette ouverture alors que ne sont pas consultés les premiers intéressés, parents, enseignants, jusqu’aux mouvements d’éducation populaire contraints à transformer leurs missions premières sous peine de voir leurs subventions drastiquement réduites ? Alors que sont valorisés des objectifs comportementaux, au nom de l’individualisation, en lieu et place d’une véritable ambition éducative.

Loin de revendiquer une quelconque nostalgie pour la sanctuarisation de l’école, les auteurs interrogent les modalités actuelles des relations entre le « dedans » et le dehors » et posent des questions trop souvent tues : l’ouverture, mais à quoi, à qui et dans quel projet politique ? Comment comprendre par exemple la mise en place des vacances apprenantes alors que les inégalités au sein du système éducatif ne cessent de se creuser ?

Les auteurs s’attachent à analyser la nécessité de chacune des instances éducatives, qu’il s’agisse de l’école mais aussi du milieu familial, de celui des loisirs et de l’éducation populaire à la condition qu’ils ne s’opposent, ni ne se concurrencent. Ils s’inscrivent dans la filiation d’Henri Wallon qui a montré que c’est dans la confrontation de ses différents milieux qu’un enfant se construit comme sujet.

Cette ouverture, telle qu’elle est actuellement mise en œuvre, entraîne une déscolarisation de l’école et une scolarisation du hors l’école, qui entretient la confusion des rôles de chaque espace éducatif. Et ce sont les enfants les moins connivents avec le système scolaire qui en subissent les effets dans leurs difficultés grandissantes à identifier le sens des apprentissages menés. Dans la déclaration récente du gouvernement devant l’Assemblée, la Première ministre confirme les inquiétudes lorsqu’elle affirme vouloir « la refondation de l'école entamée lors du dernier quinquennat » ou encore « élargir au lycée professionnel le succès de l'apprentissage ».

C’est la fonction de l’école qui est remise en cause en profondeur : apprendre à se libérer de ses représentations, de ses croyances pour apprendre à exercer une pensée critique, et faire des choix éclairés et responsables.

C’est parce que l’école s’adresse à tous qu’elle a pour fonction d’ouvrir à une culture commune, dans un projet réellement démocratique. Car là est bien l’enjeu. Les enthousiasmes successifs pour des « innovations » (qui par ailleurs ne le sont pas toujours) ont montré qu’elles servent les intérêts des classes dominantes et n’empêchent en rien le creusement des écarts entre enfants en fonction de leurs origines sociales et culturelles.

Des expériences relatées dans ce numéro de Carnets rouges montrent combien l’articulation dedans/dehors est une affaire sérieuse, qui engage l’avenir. À la condition qu’elle s’inscrive dans une co-construction dans l’objectif de bâtir pour tous un projet émancipateur.