Dimension nouvelle de la crise, rapport de Christian Picquet

Dans son rapport, Christian Picquet fait le point sur les évolutions politiques, la rentrée du pouvoir macronien, l’enjeu des municipales et le calendrier d’actions du PCF. Extraits.

La crise française prend dès lors une dimension nouvelle.

À défaut de converger encore dans un mouvement d’ensemble, les foyers de contestation et de mobilisation s’accumulent : des jeunes se dressant contre le cynisme des gouvernants face au dérèglement climatique aux personnels soignants défendant la santé publique ; des enseignant·e·s soulevé·e·s contre la casse de l’école publique à la population de l’agglomération rouennaise angoissée par les retombés de l’incendie de Lubrizol ; des retraité·e·s aux pompier·e·s en passant, j’en ai parlé, par les policier·e·s.

La colère des salarié·e·s de General Electric ou de Michelin face aux liquidations industrielles donne également la mesure de la profondeur de la crise sociale.

Quant au soulèvement en cours du monde agricole, directement percuté par le libre-échangisme que symbolisent les traités CETA ou MERCOSUR, ainsi que par la stigmatisation dont il fait l’objet pour des pratiques polluantes dont on ne lui donne pas les moyens de sortir, elle illustre la défiance qui se généralise envers la parole publique.

Ce n’est pas sans raison que le politologue Jérôme Jaffre vient de parler d’une « gilet-jaunisation de la société française ».

Cela ne met que davantage en lumière l’inexistence d’un débouché progressiste à cette incandescence sociale et à cette instabilité politique.

D’un côté, du fait des défaites enregistrées depuis des années, le mouvement social se heurte à la difficulté de construire la convergence de ses luttes. De l’autre, l’état désastreux dans lequel le quinquennat précédent a laissé la gauche hypothèque les avancées qui seraient indispensables sur la voie d’un rassemblement, qui se ferait l’écho des aspirations populaires et s’affirmerait à partir d’une offre de rupture avec les logiques capitalistes.

Ne nous le cachons pas, ce vide et la déliquescence de la vie politique qui en résulte, sont lourds de dangers pour la France, pour notre peuple, pour la République. Car ils ouvrent un espace à toutes les solutions démagogiques, réactionnaires, autoritaires.

De ce point de vue, la manière dont le président de la République a rouvert la boîte de Pandore avec son prétendu débat sur l’immigration constitue une alerte.

(…) Notre parti a eu mille fois raison de répondre par la lettre de Fabien Roussel à Emmanuel Macron. Il fallait opposer avec force le devoir de solidarité et le combat de l’égalité des droits à la stigmatisation d’hommes et de femmes qui sont nos frères et nos sœurs, par-delà leurs origines, les conditions de leur venue, la couleur de leur peau ou leurs religions.

Et il était tout aussi indispensable que nous nous adressions au Conseil supérieur de l’audiovisuel afin qu’il soit mis fin à la complaisance d’une série de médias à l’égard de Monsieur Zemmour.

Nos camarades de la fédération des Hauts-de-Seine proposent, à leur tour, d’organiser un rassemblement ce lundi devant le siège de Cnews, pour protester contre le temps d’antenne quotidiennement octroyé par cette chaîne à ce personnage, condamné plusieurs fois pour ses appels à la haine raciale et religieuse. Je vous propose que cette initiative devienne celle de tout le parti et qu’elle soit prise en charge pratiquement par toutes nos fédérations d’Ile-de-France.

Tout cela doit nous renforcer dans la conviction que le Parti communiste a d’immenses responsabilités à assumer.

Sans nous dissimuler nos faiblesses, nous sommes une force militante qui compte. Qui dispose d’élu·e·s reconnu·e·s et implanté·e·s. Dont le rôle pour et dans les mobilisations est essentiel. Et qui est un repère dans la bataille idéologique qui fait rage.

Dès l’université d’été, puis à la Fête de l’Humanité, nous avons lancé un appel à une nouvelle union populaire. Nous nous sommes adressés à l’ensemble des forces de gauche et écologistes, que nous avons rencontrées par la suite.

Nous avons, à ces occasions, esquissé ce que devraient être les contenus de cette union populaire, afin qu’elle réponde aux défis de civilisation auxquels l’humanité doit faire face. Et nous avons proposé la méthode pour parvenir à conquérir une majorité politique et aboutir à un programme de gouvernement en commun : non pas se limiter à des accords de sommet, mais construire le rassemblement de la base au sommet, avec les forces citoyennes comme avec le mouvement social, et sous leur contrôle.

Cela dit, au vu de l’état du paysage politique et social, la lucidité nous impose d’enregistrer que le chemin sera long, qu’il n’y aura pas de raccourci pour aboutir à une offre politique à même de battre le pouvoir actuel, la droite et l’extrême droite.

Il nous faut, en conséquence, être déjà de toutes les mobilisations, favoriser toutes les convergences imaginables, rassembler le plus largement, œuvrer aux politisations indispensables, et aider à ce que des victoires soient arrachées.

L’enjeu est décisif, car ces dynamiques à bâtir sont la condition pour que le monde du travail reprenne enfin confiance en lui, qu’il reprenne conscience de sa place et de sa force, et que, ce faisant, l’espoir renaisse.

Dans le même temps, il nous appartient de porter de grandes batailles politiques, autour de propositions alternatives aux orientations gouvernementales et aux choix du capital, l’objectif étant tout à la fois de dynamiser les luttes et de donner à voir qu’il est un autre avenir possible. »

Le rapporteur évoque deux de ces batailles, les retraites et ADP, sans oublier toutes celles qui vont se livrer contre la casse de nos industries. (General Electric) et les propositions de loi déposées par nos groupes parlementaires (Santé, statut des travailleurs des plateformes numériques).

« Je voudrais encore évoquer la nécessité de donner toujours plus de poids à nos propositions face au dérèglement climatique et à la catastrophe écologique.

Cette priorité de notre action s’est concrétisée, comme nous l’avions décidé lors de notre dernier Conseil national, par une présence bien plus visible que d’ordinaire dans les marches du mois de septembre. Il convient de poursuivre résolument dans cette voie. »