Européennes : premiers enseignements

Dans son introduction à la réunion du CEN du 27 mai dernier, Fabien Roussel tirait de toutes premières leçons de l’élection européenne.

Il y a d’abord le besoin d’inscrire l’analyse de la situation française dans le cadre plus large de l’Union européenne, disait-il, où « la finance, les libéraux remportent une victoire, et les forces de transformation sociale sont en net recul ».

Second point, plus global, sur les rapports de forces électoraux et la situation qu’ils induisent : « L’ambition de Macron de structurer la vie politique autour d’un affrontement avec le RN est, disons-le, un pari dangereux mais réussi pour le Président de la République (qui) inscrit En Marche durablement dans le paysage politique, en aspirant cette fois-ci une grande partie de l’électorat de droite.(...) Nous ne réalisons pas le score que nous espérions » (absence d’élus communistes au Parlement européen, enjeu financier pour le Parti).

« Il faudra évidemment pousser nos analyses sur ce que traduit ce résultat. Plusieurs remarques toutefois :

  • Notre score s’inscrit dans un compte global où la gauche demeure très faible. Sans dynamique à gauche, le vote communiste est encore moins une évidence.
  • L’abstention, même en recul, reste massive et traduit l’incapacité à ce stade, pour nous et pour l’ensemble de la gauche, à incarner une alternative crédible à Macron, notamment pour le salariat. Elle est notamment plus forte chez les ouvriers (55 %) et les employés (59 %) !
  • Le renforcement de notre organisation et des gestes militants demeure un enjeu majeur : 38 % de notre électorat s’est abstenu, alors que de nouveaux électeurs de gauche se sont emparés du vote communiste.
  • Le monde du travail, que notre liste incarnait au moins dans sa forme et ses propositions, n’identifie pas le vote communiste comme le levier pour apporter des réponses à sa colère mais aussi à ses aspirations.
  • Une fin de campagne qui a cristallisé deux questions : l’affrontement organisé Macron/Le Pen et la question écologique. Dans ce cadre, nous avons certainement échoué à incarner un ou deux enjeux essentiels qui auraient pu conduire à une mobilisation populaire sur le vote pour notre liste.
  • La crise climatique et écologique a, pour de nombreux électeurs, conduit à une mobilisation sur le vote EELV, parce que n’est pas encore assez identifiée la nécessité de transformer radicalement la société pour y répondre.

Pour autant, ce mauvais résultat dans les urnes contraste avec des éléments positifs :

• La très belle campagne de nos candidats, de notre tête de liste, Ian Brossat, de nos députés sortants, Patrick Le Hyaric, Marie-Pierre Vieu, de tous nos candidats qui se sont révélés partout des animateurs de la vie du Parti et en particulier des secrétaires fédéraux et de section.

  • Une forte mobilisation militante, avec un enthousiasme et une fierté des communistes renforcée.
  • Le renforcement du Parti (700 adhésions supplémentaires par rapport à l’année dernière à la même date) et de son organisation, avec le retour de gestes militants importants (porte-à-porte plus nombreux, contacts plus serrés avec les adhérents et les électeurs, etc.).
  • Visibilité plus forte du Parti à l’échelle nationale, qui renforce celle que nous avions maintenue au niveau local, avec nos organisations et nos élus.
  • Des liens renforcés avec des acteurs du mouvement social, de la culture et de la création, des intellectuels et des personnalités de gauche, nationalement et localement, qu’ont traduit le Comité de soutien, les nombreux appels à voter « sectoriels », etc.
  • L’incarnation, avec Ian notamment, de renouvellements attendus dans la vie politique, qui participe certainement d’un intérêt confirmé des jeunes de 18 à 24 ans (4 %).
  • Le Parti est apparu comme une force qui ne cède pas sur des valeurs essentielles à gauche : contre le pouvoir de l’argent, contre les idées xénophobes en ne lâchant rien par exemple sur l’accueil des réfugiés, pour les services publics alors que la bataille idéologique tend à faire prévaloir la concurrence de tous contre tous...

Si le résultat est très décevant, la dynamique de campagne, l’enthousiasme militant, le regard nouveau porté sur le PCF et sur son rôle dans la bataille idéologique et dans les luttes, sont des points d’appui pour reconstruire l’influence du PCF. »

Le rapporteur évoque ensuite un paysage politique bouleversé (installation durable d’En Marche ; un RN qui joue l’alternative ; des écologistes qui entendent participer à la recomposition politique ; des forces politiques à gauche qui n’ont pas encore trouvé le chemin d’un dialogue ; la pérennisation d’une abstention massive de l’électorat populaire).

Enfin le secrétaire national du PCF s’interrogeait : « Quelles perspectives pour le Parti ? Mobiliser, en vue des municipales, sur la double ambition, partout, de battre la droite (LREM et LR) et l’extrême droite, qui n’ont pas le même électorat.

Ouvrir tout de suite des perspectives pour ne pas laisser notre peuple dans ce piège terrible, notamment en travaillant des batailles politiques qui redonnent confiance, qui fassent la démonstration qu’il est possible de gagner face à Macron et à la finance » (pouvoir d’achat, référendum contre la privatisation d’ADP, retraites, défense et extension des services publics (santé, hôpitaux) ; contre la réforme institutionnelle.

La Fête de l’Humanité est le grand rendez-vous de la rentrée où « nous devons porter la perspective d’une reconstruction de la gauche. »