Lettre de prison de Cesare Battisti

Bonjour Gérard, Comme c’est bon d’écouter la voix de cette inoubliable France qui fait chaud au cœur (excuse le mauvais français, j’ai un peu oublié depuis !). Je suis heureux de l’initiative des vieux camarades polardeux, il n’y a pas de mot pour vous remercier tous.

Je trouve précieuse cette aide à caractère international, sans compter que ma petite famille est toujours parisienne. Vous pourriez peut-être élargir votre pétition à des auteurs italiens en passant par le camarade Valerio Evangelisti de Bologne ou aussi la faire arriver au Brésil en l’envoyant au mail suivant, à l’attention de Magno de Carvalho : [email protected].

Je dois vous expliquer un peu ce qui s’est passé après que Fux, le ministre de la Cour suprême fédérale, s’est honteusement vendu au fasciste Bolsonaro, autorisant ainsi mon extradition. Étant avisé de cette possibilité par avance, j’ai pris contact avec le gouvernement bolivien avant de passer la frontière vers ce pays. Là j’ai été accueilli par du personnel de la chancellerie et logé dans un local appartenant au gouvernement, en attendant que ma demande de refuge (d’asile ? GS) soit discutée par le CONARE (Comité national des réfugiés).

Quatre semaines ont passé pendant lesquelles, aujourd’hui c’est une évidence, l’Italie et le Brésil faisaient pression sur le gouvernement bolivien en agitant surtout la question économique et ses conséquences sur le pays. Bref, samedi 13 (12 ? GS), j’ai été enlevé manu militari, me privant ainsi d’être jugé régulièrement par un procès d’extradition selon les lois boliviennes (procès que j’aurais gagné puisque en prescription depuis 15 ans). On m’a amené de pure force à l’embarquement.

Et voilà où les bandits du gouvernement d’extrême droite italien exécutent leur sale jeu : il y avait sur la piste un avion brésilien qui aurait dû me transporter jusqu’à Brasilia et, de là, m’embarquer dans un avion italien pour Rome. J’étais en train de monter dans l’avion brésilien lorsqu’un contre-ordre nous a fait faire demi-tour.

Et voici que commence une discussion animée entre les autorités des trois pays en question. Finalement c’est l’Italie qui gagne le tour et on m’embarque dans leur propre avion dans un vol sans escale jusqu’à Rome. Pourquoi ? Simple : les salauds ont évité le Brésil pour ne pas appliquer l’accord d’extradition brésilien qui interdit la perpète et oblige l’Italie à la concession de remise de peine. Résultat : un enlèvement pur et proprement criminel pour m’infliger en toute illégalité une peine cruelle exclue par le traité d’extradition.

Je ne sais pas si j’ai été clair. C’était pour vous donner quelques éléments en plus. Bien sûr les avocats sont en train de faire tomber les effets de cette action mercenaire mais, comme vous le savez, toute aide dans le sens de l’info est de vitale importance.

Je vous embrasse.

Cesare

PS : Avez-vous des nouvelles de Fred Vargas ?

Cesare Battisti - Casa circonlariale S. Soro - Loc. Pedriaxiu - Massama - 09170 Oristano

Signez la pétition