Politiser les municipales

Dans son rapport devant le Conseil national, le 30 janvier dernier, Fabien Roussel analyse le climat social (nouveau cycle de luttes, retour de la question de classe, résistance de l’opinion au déferlement idéologique des dominants). Il souligne le rôle joué par le PCF, reconnu comme une « force utile », ses efforts pour trouver un débouché politique à la crise. Puis il aborde l’enjeu des municipales.

« Afin de construire un débouché politique au mouvement social, aux colères qui s’expriment crescendo dans le pays depuis plusieurs mois, dans un tel contexte, nous appelons à travailler au rassemblement populaire le plus large autour d’un projet alternatif clair, porteur de ruptures radicales avec le système.


Les élections municipales de mars prochain sont de ce point de vue une étape décisive et je crois qu’en étant très offensifs dans la campagne qui est désormais ouverte, nous pouvons marquer des points décisifs partout dans le pays, après une séquence municipale très difficile en 2014. Bien sûr, il nous faut valoriser notre bilan, là où nous dirigeons des communes ou participons à des majorités sortantes. Bien sûr aussi, il nous faut montrer combien les candidats communistes, déjà élus ou pas, sont des points d’appui pour défendre les intérêts des populations et soutenir les luttes. Ce sont des éléments de crédibilité très importants. Mais je crois que la situation politique que nous connaissons depuis maintenant plus de deux ans nécessite que nous politisions au maximum cette échéance électorale.


A ce titre, il nous faut être très offensifs. La question sociale, l’aspiration démocratique, la question de l’argent et de sa réorientation vers des politiques publiques répondant aux exigences populaires doivent être au cœur de ces élections. Oui, nous pouvons faire grandir l’idée que les politiques d’austérité et de casse des services publics de ce gouvernement rendent plus difficile de répondre aux attentes de nos concitoyens. Oui, il faut dénoncer les attaques en matière de pouvoir d’achat, mais aussi les baisses des dotations aux communes dont la majorité est responsable. Il serait trop facile que les candidats En Marche et LR ne soient pas interpellés sur ces questions. Darmanin, Villani, Grivaux, Collomb doivent aussi rendre des comptes sur ces hausses des factures d’électricité, des mutuelles, des loyers, de l’essence, sur la baisses des APL, sur les privatisations de nos trains, sur les fermetures de guichets, des trésoreries municipales, sur la baisse de 13 milliards d’euros de dotations aux collectivités, sur l’état de nos hôpitaux publics, sur la réforme de l’enseignement et sur cette réforme des retraites !


N’hésitons pas à être encore plus offensifs, il faut leur coller l’étiquette LREM sur le dos, eux qui veulent la faire effacer dans les communes de moins de 9 000 habitants ! Et montrons combien les engagements pris par les candidats communistes sont porteurs, à l’opposé, de justice sociale, de progrès social, d’innovations démocratiques. Une ville à direction communiste, c’est une ville qui pratique des tarifs sociaux les plus bas pour permettre à tous l’accès à la cantine, à la garderie, à la culture ou aux sports, et permettre la mixité sociale qui est la base du vivre ensemble. C’est celle qui a inventé les MJC et reste toujours à la pointe pour permettre aux jeunes d’accéder aux sports et à la culture. C’est celle qui développe des centres municipaux de santé depuis toujours, en développant le tiers payant. Ce sont aussi nous, les communistes, qui mettons en œuvre depuis plusieurs années les cantines bio, les circuits courts, pour nos enfants, avec des cuisines centrales le plus souvent. Enfin, c’est nous qui avons décidé de mettre en avant dans de nombreuses communes, dans nos programmes la gratuité des transports, le développement des transports collectifs, les transports en commun, car nous voulons construire une alternative à la voiture en proposant des transports non polluants et gratuits partout où c’est possible !

 

Casser le duo Macron/Le Pen

 

Mais pour cela, il faut donner des moyens aux communes et sortir des politiques d’austérité ! C’est pourquoi cette question de l’argent, de la finance doit être placée aux cœur de nos combats. Oui, nous voulons reprendre le pouvoir sur l’argent, sur les richesses que nous créons pour répondre aux besoins de nos concitoyens, pour relever le défi climatique. N’ayons pas peur de mettre ces sujets au cœur de nos échanges avec les autres forces de gauche et écologistes. Poussons le débat et la confrontation sur ces questions, car il serait trompeur de faire croire aux Français que nous allons relever le défi climatique sans remettre en cause la finance, sans remettre en cause le capitalisme. (…)


Dans la bataille idéologique qui se mène dans le pays, pointons aussi l’extrême droite qui n’avance aucune proposition et continue de diviser nos concitoyens selon leurs origines. Pour eux, l’ennemi c’est l’immigré, pour nous c’est la finance. Eux surfent sur le mouvement social, sur la colère, mais ils n’attaquent jamais le capital. Cela aussi il faut le dire. C’est pourquoi, toutes nos propositions font partie de ce projet de société que nous défendons. C’est aussi comme cela que nous ouvrirons une perspective politique de progrès lors des prochaines échéances nationales de 2022. Car si nous gagnons actuellement la bataille de l’opinion sur les retraites, la perspective politique, malgré touts nos efforts, fait défaut. Et toutes les initiatives que nous prendrons ne seront jamais médiatisées. Tout sera fait pour les minorer. Dans un tel mouvement social, d’une telle intensité de confrontation entre les forces du capital et le monde du travail, nous devrions normalement nous renforcer, être plus forts, plus audibles. Je ne dis pas que nous ne gagnons pas en audience, en renforcement. Mais ce n’est pas suffisant. Le comble serait même que l’abstention grossisse toujours et que l’extrême droite se renforce dans un tel climat social !


Nous devons nous fixer l’objectif de réussir à convaincre les abstentionnistes de retrouver le chemin des urnes pour soutenir un autre projet de société et des valeurs de progrès, tournant le dos au libéralisme et à l’extrême droite. Il faut réussir à casser le duo Macron/Le Pen en se fixant l’objectif que l’extrême droite ne soit pas présente au second tour de cette élection ! C’est cela qui doit être d’abord notre priorité. Ce n’est pas d’être face à Le Pen, car ça c’est le pire, c’est accréditer sa présence alors que c’est dans 2 ans et demi. Tordons d’abord le cou à l’idée que l’extrême droite pourrait incarner une perspective politique.


Le face à face qu’il faut obtenir, c’est celui d’une confrontation entre ceux qui défendent la finance et ceux qui défendent l’être humain, entre le capitalisme et l’Humain et la Planète d’abord, entre ceux qui portent un modèle de société à bout de souffle, contre ceux qui aspirent à bâtir un nouveau modèle économique, écologique et porteur de justice sociale. Alors, oui, cette campagne des municipales est déterminante pour la suite. »