Succès historique du Sinn Féin en Irlande: Premières conséquences politiques du Brexit

Avec plus de 530 000 voix en vote de première préférence et 24,5% des voix aux élections législatives irlandaises du 8 février, le Sinn Féin s’impose comme le premier parti en voix dans les 26 comtés du sud de l’Irlande. Cela assure au parti républicain 37 sièges au Parlement de Dublin. Si l’on y ajoute les résultats des élections dans les six comtés du Nord de 2017, le Sinn Féin, avec 700 000 voix, est aujourd’hui le premier parti dans toute l’Irlande.

Pour la première fois depuis la partition de l’île en 1921, la domination des deux partis qui s’échangent ou se partagent le pouvoir au Sud, le Fianna Fáil et le Fine Gael, est remise en cause.

Le Sinn Féin a bâti ce succès historique en approfondissant son orientation républicaine et sociale et en l’adaptant aux nouvelles conditions créées par le Brexit. Son manifeste électoral, intitulé «Donner une pause aux travailleurs et aux familles», est fondé sur la fin des politiques d’austérité néo-libérales, avec des propositions concrètes sur le système public de santé (ouverture de 1500 lits et embauches de médecins et d’infirmier.e.s), des aides pour les travailleurs indépendants, des investissements d’un milliard d’euros dans les transports publics, l’opposition au recul de l’âge de départ à la retraite, la fin des arnaques de la part des compagnies d’assurance privées. Le Sinn Féin allie cette exigence sociale, chiffrée, à une ambition politique majoritaire allant jusqu’à se déclarer clairement candidat à exercer le pouvoir. La décomposition du gouvernement sortant, les menaces sur le système de retraites, les ravages de la spéculation immobilière et les scandales provoqués par les abus des assurances ont marqué la campagne électorale.

Si les enquêtes d’opinion concluent au fait que la question du Brexit n’a sans doute pas été déterminante dans le résultat de ces élections législatives, il n’en demeure pas moins qu’elle aura constitué une des toiles de fond de ces élections. Les résultats du Sinn Féin dans les régions frontalières ne sont pas fortuits. Le sort de l’Irlande, comme l’ensemble de la «relation future» entre le Royaume-Uni et l’UE, n’est pas définitivement réglé, loin s’en faut. L’accord trouvé n’est pour le moment que «transitoire». Le résultat du Sinn Féin au Sud, combiné avec la résolution de la crise politique provoquée par les Unionistes au Nord, est incontestablement un appui majeur pour que les intérêts sociaux et démocratiques du peuple irlandais soient respectés dans ce contexte. Le Sinn Féin défend, à raison, l’application intégrale des accords de paix de 1998, dits «Accords du Vendredi saint», l’établissement d’un comité parlementaire sur l’unité de l’Irlande, et la perspective d’un référendum sur l’unité organisé à la fois au Nord et au Sud. Car le Brexit pose effectivement cette question.

Fabien Roussel a réaffirmé au Sinn Féin la profonde solidarité du PCF et lui a exprimé ses félicitations pour le résultat des élections. La solidarité historique du PCF avec la lutte du peuple irlandais et avec le Sinn Féin reste pleine et entière!

Vincent BOULET
Responsable Europe du PCF