À droite toute ? L’école publique menacée par les idéologies réactionnaires

L’accélération ces cinq dernières années d’une politique néolibérale déjà bien installée a montré une vraie porosité entre une droite gouvernementale et une extrême droite de plus en plus autorisée à avancer ses pions en toute impunité. Les dernières élections l’illustrent si c’était nécessaire.

Le précédent ministre de l’Éducation s’est montré particulièrement efficace pour rendre actives des convergences entre droite et extrême droite, montrant dans les prescriptions et autres décrets, comme dans sa gouvernance, que le néolibéralisme sait emprunter quand il en a besoin aux conservatismes les plus réactionnaires. Réaction qui s’en satisfait, malgré quelques oppositions, et renvoie l’ascenseur, comme à l’Assemblée nationale. 

Bien sûr il ne saurait être question d’assimiler les uns aux autres, mais il n’est pas possible non plus de totalement dissocier l’idéologie réactionnaire de l’extrême droite et les mises en marché d’un système ultra libéral installé depuis des décennies. 

L’emprise des marchés sur les choix politiques nationaux ne peut nous faire oublier que l’idéologie véhiculée par l’extrême droite se diffuse de différentes manières dans les esprits. Avec une grande efficacité : on le voit dans le traitement de l’enseignement professionnel et la promotion de l’apprentissage le plus tôt possible, qui cumule une naturalisation des différences, le rejet d’une culture pour tous et un cadeau aux logiques du privé. On le voit dans la prescription de fondamentaux, dont la caractéristique est qu’ils ne le sont en rien, qui pour les uns sont le retour à une école mythifiée mais inégalitaire et pour les autres visent à l’employabilité de ceux qui n’ont pas le privilège d’être « méritants » ou « talentueux ».

Les intentions ne sont pas nécessairement les mêmes mais se rencontrent étonnamment ! Autoritarisme, chasse aux « pédagogistes » ou autres « islamogauchistes » pour imposer une pédagogie officielle, formation des enseignants exsangue, individualisation des apprentissages qui rend les élèves issus des milieux populaires responsables de leurs échecs scolaires, évacuation de la question sociale, instrumentalisation des savoirs à des fins idéologiques, mépris et haine de classe, mérite pour tout viatique, organisation hiérarchisée de l’école, pilotage par l’évaluation, laïcité dévoyée dans ses fondements… Les similitudes sont nombreuses.

Des chercheurs, des syndicalistes partagent leurs outils d’analyse, avec des illustrations sur la réalité du frontisme municipal en France, ou dans des pays comme le Chili et le Brésil, qui ont « montré le chemin » en matière de casse de l’école publique. Malgré des discours lénifiants, se joue à trop bas bruit une droitisation extrême des politiques éducatives. 

Ce numéro de Carnets rouges a pour ambition de participer à une réflexion collective sur la réalité des menaces qui pèsent sur le système éducatif, afin de les combattre pour imposer des transformations démocratiques aujourd'hui plus nécessaires que jamais.

Christine Passerieux

rédactrice de Carnets rouges