Colloque de la convergence nationale rail du 26 mars 2022

Le 26 mars 2022 , afin de marquer de bonne façon ses dix ans d’existence au service de la promotion et du développement du Service public ferroviaire, la Convergence nationale rail (CNR), association de composition pluraliste, organisait à Paris un colloque visant à mettre en exergue le rôle déterminant du rail dans une politique des transports susceptible de réduire concrètement les émissions de gaz à effet de serre (GES).

Ce colloque intervenait dans un contexte national et international singulièrement chargé, voire anxiogène, qui pouvait faire passer la défense du Service public ferroviaire pour dérisoire face à l’actualité guerrière et à son cortège de drames et de crises, alors que la pandémie Covid-19 n’est pas complètement derrière nous. Nous pensons toutefois que notre combat a toute sa place dans ce contexte où le sixième rapport du GIEC nous rappelle l’urgence qu’il y a à lutter plus vite et plus efficacement contre le réchauffement climatique ! Pour ce faire, le train, le rail public constituent des atouts indéniables quand on sait que le train ne représente que 10 % de l’ensemble des transports contre 85 % pour la route, mais ne pèse que pour 0,3 % des émissions totales de CO2 !!

Le colloque a été rythmé par la tenue de trois tables rondes, animées par des journalistes, où des responsables d’associations d’usagers, des élus politiques, des ONG, des syndicalistes, des experts, des représentants d’opérateurs de transports ont pu exposer et confronter leurs points de vue, permettant ainsi de nourrir des échanges de haut niveau.

Ainsi nombre d’intervenant·e·s ont pu démontrer que l’ouverture à la concurrence des activités ferroviaires de pays membres de l’UE tourne le dos à la réduction du bilan carbone des transports de voyageurs et de marchandises. De plus, il a été fait état que face à la dégradation du service rendu, à l’explosion des coûts, aux manquements des opérateurs privés, plusieurs pays (Angleterre, Ecosse, Norvège, Pays de Galles, Allemagne) reprennent en gestion publique l’exploitation d’activités ferroviaires (trafics voyageurs) qui avait été confiée au privé.

La Belgique décide que pendant 10 ans elle n’ouvrira pas à la concurrence ses trafics voyageurs. Le Luxembourg, quant à lui, s’oppose au diktat européen. En Suède 70 % de la population est favorable à un retour au monopole public, et en Suisse, il a été décidé à l’été 2021 d’abandonner la concurrence dans le trafic voyageurs au motif qu’elle coûte trop cher et qu’elle complexifie inutilement le système.

En France, mus par des sentiments de revanche vis-à-vis de la SNCF, des cheminots, et par des postures dogmatiques certains conseils régionaux, ouvrent l’exploitation des TER à la concurrence sur tout ou partie de leur territoire. Plusieurs intervenant·e·s ont indiqué que ce qui anime ces conseils régionaux n’est pas de répondre aux besoins des usagers, mais bien plus de faire de la place au privé pour lui permettre de faire du « cash » sur les rails, quitte à faire «  ruisseler » abondamment l’argent public ! L’attribution de l’exploitation à Transdev de l’exploitation de la ligne TER Marseille-Nice (10 % des trafics-34 % des recettes de la Région !) est révélatrice de cette politique de dépeçage du Service public ferroviaire. Les attaques contre les activités de la RATP et de la SNCF en Île-de-France sous l’impulsion de Valérie Pécresse visant à ouvrir à coups d’appels d’offres à la concurrence le réseau Bus, les métros, les RER, les trains transiliens , les trams trains… ont été condamnées ! C’est une véritable « vente à la découpe » qui est engagée, contre laquelle des mobilisations sociales et citoyennes s’organisent.

La table ronde centrée sur la place du rail dans la transition écologique a permis de vérifier que l’on ne pourra pas doubler le volume des marchandises transportées par rail d’ici à 2030 si les pouvoirs publics n’investissent pas plus dans le système ferroviaire français (infrastructures, matériels roulants, moyens humains). De ce point de vue, il a été utile que soit rappelé que l’Allemagne va consacrer 86 milliards d’euros à son réseau sur 10 ans (soit 8,6 milliards par an), alors que l’État français investit deux fois moins qu’en Allemagne et en Italie !

Le Colloque de la CNR a bien été la caisse de résonance de propositions de relance du Rail public en rupture avec les logiques libérales et des actions qui se développent pour ce faire sur les territoires et qu’il faut renforcer. Ainsi ont émergé des débats, entre autres l’urgence de développer le Fret ferroviaire, avec notamment l’amplification de l’électrification du réseau, la relance des trains de nuit, de l’auto-train, l’opposition à la fermeture des gares, des guichets, à la suppression des effectifs de personnels entraînant une déshumanisation du Service public ferroviaire, accentuée par la dématérialisation de la vente des titres de transports. Cette rupture d’égalité d’accès et de traitement des usagers/citoyens a conduit la CNR à déposer deux recours au Tribunal administratif contre SNCF et SNCF Voyageurs.  

Didier Le Reste

président de la CNR