La petite histoire du siège du PCF – Belleville, terre de la révolte (3)

C’est sur le territoire de l’ancienne commune de Belleville, sur le terrain qui appartenait à « La maison des syndicats » que sera construit le siège du PCF. Des années plus tôt, Maurice Thorez en avait déjà émis l’idée, souhaitant voir le futur siège édifié sur ce « haut lieu du mouvement ouvrier national et international ».

Le Mur des fermiers généraux avec ses barrières d’octroi, les travaux d’Haussmann, la révolution industrielle, son rattachement à Paris et l’enceinte de Thiers ont façonné l’histoire de Belleville et de sa population que Jules Vallès appelait « la classique terre de révolte ».

Prélude à la prise de la Bastille, le 12 juillet 1789, la population dévaste et incendie les barrières d’octroi, synonymes d’injustice. Sur les 55 barrières qui entouraient Paris, Belleville en comptait sept ; elles seront rétablies en 1798. Au lendemain de la Révolution, se constituent à Belleville des sociétés populaires proches des Jacobins, qui gèrent la commune, organisent des fêtes et des banquets et où la chanson devient un outil de propagande.

À partir de 1840, l’activité des sociétés chantantes dans les goguettes de Belleville, les banquets comme celui réunissant 1 200 convives à Belleville le 1er juillet 1840 où, pour la première fois, le terme de communiste fut utilisé pour qualifier le rassemblement, vont concourir à une fermentation politique de la classe ouvrière qui entrera de plain-pied dans la révolution de 1848. Les ouvriers bellevillois prendront part aux combats et formeront le dernier îlot de résistance.

Son rattachement à Paris en 1860 éclate Belleville entre le 19e et le 20e, le 11e et le 10e arrondissement. Le développement démographique de Belleville connaît un rythme supérieur à celui de Paris ; il n’y a là aucune infrastructure digne de ce nom, l’insalubrité règne, l’habitat est précaire et surpeuplé. Un vrai décor des Misérables de Victor Hugo. Au demeurant, cet « enfant déguenillé qui descendait par la rue Ménilmontant... » n’était autre que Gavroche qui deviendra le symbole de la révolte dans l’imaginaire collectif.

Le caractère ouvrier et populaire de Belleville s’affirme et renforce sa conscience de classe et sa vocation de terre d’accueil de différentes immigrations. Belleville prendra une large part à la Commune de Paris de 1871 ; elle en sera le dernier bastion et les derniers combattants seront fusillés au Père-Lachaise et au cimetière de Charonne.

En 1877 se crée la Bellevilloise, la première coopérative ouvrière parisienne.

Dans ce vivier ouvrier et révolutionnaire, la CGT installe la Maison des syndicats en 1921, sur l’espace occupé aujourd’hui pas le siège du PCF. Plusieurs organisations ouvrières s’y installent, comme le Secours rouge international. L’URSS offre en 1925 son pavillon de l’exposition des Arts déco, et cette installation accueillera la première université ouvrière, ainsi qu’une contre-exposition coloniale en 1931 et, en 1936, le comité antifasciste qui enregistre les volontaires pour les Brigades internationales.

À l’appel du PCF, les Bellevillois, environ un millier, descendent le 9 février 1934 à la manifestation antifasciste Place de la République.

Le 23 août 1944, Madeleine Riffaud fête ses vingt ans. Elle dirige une escouade de FFI-FTP et bloque un train allemand à la gare de Ménilmontant ; les nazis fuient par le tunnel de Belleville mais doivent se rendre. Pendant ce temps, rue de Ménilmontant, un autre groupe de résistants bloque deux autres trains et arrête les soldats nazis.

Cette tradition de Belleville se traduira par l’élection de députés communistes dans les 19e et 20e arrondissements (3 en 1967, 4 en 1973 et 2 en 1978).

Gérard Pellois

Crédit photo : BNF

 

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La petite histoire du siège du PCF – 1. Le « 120 » puis le « 44 »

La petite histoire du siège du PCF – Le choix de l’architecte (2)

La petite histoire du siège du PCF – Belleville, terre de la révolte (3)

La petite histoire du siège du PCF – Un bâtiment éminemment politique (4) 

La petite histoire du siège du PCF — Les constructeurs (5)

La petite histoire du siège du PCF Première phase de la construction (6)

La petite histoire du siège du PCF – Deuxième phase de la construction (7)

La petite histoire du siège du PCF – Revue de presse (8)

La petite histoire du siège du PCF – Le parvis, la coupole, le « foyer » (9)

La petite histoire du siège du PCF – Visite des 1er et 3e sous-sols (10)

La petite histoire du siège du PCF – Le 1er étage (11)

La petite histoire du siège du PCF – Du 2e au 4e étage (12) 

La petite histoire du siège du PCF – 5e-6e étages (13)

La petite histoire du siège du PCF – La terrasse (14)

La petite histoire du siège du PCF Le siège du PCF, un lieu de culture (15)

La petite histoire du siège du PCF – Les événements artistiques et culturels (16) (Expositions – Créations)

La petite histoire du siège du PCF - Les événements artistiques et culturels (18)

La petite histoire du siège du PCF - Bibliographies (19)