Sommet de l’OTAN : Mobilisés pour la paix et contre l’escalade infernale

La France, l’Europe, vont-elles se laisser enrôler par les États-Unis dans le dispositif d’affrontement avec la Chine ? C’est tout l’enjeu de la parole de la France lors des sommets du G7 et de l’OTAN.

Derrière les postures morales "Défendre les valeurs", énoncées à la Conférence de presse de l’Élysée jeudi 10 juin, se profile la réalité d’un alignement dans le camp belliciste que Joe Biden est venu réunir en Europe, comme il l'a fait en Asie du Sud-Est.

Tous les commentateurs le soulignent : En Europe, nous assistons "au retour du chef", et le contenu de la tournée de Joe Biden sur le vieux continent le souligne. Au nom des « droits humains », en oubliant un peu vite l’indéfectible soutien à l’Arabie Saoudite, aux Émirats, Turquie, Israël, et à tant de régimes violents et corrompus d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie, les USA exigent de leurs alliés européens la participation à une "alliance mondiale des démocraties" face aux régimes autoritaires chinois, et accessoirement russe.

Nous avons la démonstration qu’avec la fin de l’ère Trump et de ses outrances, le climat international est loin de s’améliorer sous la présidence Biden. "Les États-Unis doivent conduire le monde", affirme Antony Bliken, le nouveau secrétaire d'État, hier conseiller des géants de l'armement, co-auteur avec la tête pensante des néoconservateurs d'un manifeste prônant le recours à la force pour conserver la prééminence des intérêts américains.

L’Amérique n’accepte pas un monde pacifique, un monde sans hégémonie, à l’heure où la Chine devient progressivement une puissance mondiale concurrente. Les USA s’inscrivent au contraire dans une logique d’affrontement, économique, technologique, militaire, pour conserver la suprématie mondiale. Ils entendent y entraîner les Européens.

Joe Biden défend avant tout les intérêts des trois piliers du capitalisme américain qui surdéterminent, au gré des changements de majorité, la politique étrangère du pays, à savoir le complexe militaro-industriel, source de la course aux armements, les majors pétroliers et gaziers, les gigantesques entreprises du GAFA et de l’Internet et des industries lucratives de l’image, imposant un nouveau colonialisme numérique.

Le volet militaire de cette stratégie dont l’OTAN est le bras armé, c’est trente ans d’agressivité au centre Europe, entraînant la montée du nationalisme russe face aux humiliations et aux actes d’hostilité et d’encerclement, la déstabilisation des pays du Proche et du Moyen-Orient, le bilan catastrophique de la guerre d’Afghanistan.

Partout, des guerres d’agression. La course aux armements, quantitative et technologique, a repris : le budget américain de la Défense, en augmentation chaque année, représente 35 % des dépenses mondiales et trois fois celui de la Chine. Les pays de l’Alliance concentrent l’essentiel des dépenses d’armement dans le monde, ainsi que des ventes d’armes. La France n’est pas en reste, contribuant ainsi à la détérioration des conditions de sa propre sécurité.

Le Parti communiste français n’accepte pas de voir notre pays, intégré dans une alliance belliciste, déjà partenaire, comme le rappelle le président Macron, de nombreuses expéditions militaires américaines, de laisser la France entraînée sur la pente d’un affrontement qui peut conduire à la guerre.

Certes, le président français prône en parole "l'autonomie stratégique" de l'Europe, comme il parle de la levée des brevets des vaccins anti-Covid, ou d'une fiscalité nouvelle pour les grands groupes internationaux qui échappent à l'impôt. Mais quant aux actes, c'est une autre chanson. La France s'aligne sur les positions les plus rétrogrades : intégration dans l'OTAN et participation aux coalitions montées par les USA, offre de dernière minute de vaccins aux pays du Sud pour contrer la lever des brevets et protéger les superprofits des actionnaires des laboratoires, poudre aux yeux d'une faible taxation des GAFA.

Au-delà de la prolongation du traité de limitation des armements stratégiques Start, la militarisation de l'espace, du cyberespace, les menaces de militarisation de l'Arctique, la mise en service de nouveaux systèmes d'armes de toute sorte, font peser de graves dangers sur le maintien de la paix, sur la sécurité de la France.

Loin des mirages d'une "Europe de la défense" en réalité supplétive des USA, l'intérêt de tous les pays européens, Russie comprise, serait de construire un cadre commun de sécurité collective afin d'apaiser les tensions en Europe orientale, tout en refusant de participer aux croisades successives lancées par les Américains.

Le Parti communiste français appelle à substituer à la logique de guerre une logique de paix, de coopération, de la construction sur chaque continent d’un cadre de sécurité collective, pour une planète solidaire.

Tant de défis, sanitaires, alimentaires, écologiques sont à relever. Ils exigent pour cela d’y associer les peuples et les États dans la diversité de leurs régimes, d'y mobiliser les formidables dépenses consacrées à la course aux armements.

La France doit quitter l’intégration militaire dans l’OTAN, alliance qu’hier le président Macron déclarait en état de mort cérébrale, et qu’aujourd’hui il appelle à une clarification stratégique. Il vient pourtant de recevoir des félicitations pour avoir rejoint au printemps son « axe indopacifique », conduisant des gesticulations aéronavales, ouvertement hostiles à la Chine.

Notre diplomatie doit enfin cesser de dresser de multiples obstacles à l'engagement d'un processus de désarmement nucléaire multilatéral.

Répondre à l'urgence d'un renversement de perspectives en ce domaine correspondrait à l'attente des peuples de voir levée l'épée de Damoclès d'un conflit nucléaire. L'initiative serait à porter au crédit de la France dans le monde.

Parallèlement en Europe, l’intérêt de la France serait de nouer hors OTAN des relations nouvelles de sécurité avec les pays voisins, à réorienter la politique africaine au service du développement. Il serait également nécessaire de déployer la même énergie à soutenir l’industrie nationale, au lieu de perdre le contrôle d’entreprises essentielles, de délocaliser à tout-va, qu’à soutenir des industries d’armement d’un format devenu excessif.

Le Parti communiste français regrette que les questions de sécurité, enjeux vitaux pour le pays, ne fassent l’objet ni d’un grand débat parlementaire, ni d’un débat dans le pays.

Une fois encore, c’est le fait du prince. Interventions extérieures, participation à des coalitions sans principes, à des guerres sans fin sans aucun contrôle parlementaire, en tenant le peuple à l'écart de ce qui concerne pourtant l'avenir commun.

Un déni de démocratie que nous dénonçons, auquel on doit mettre fin.

Nicolas Devers-Dreyfus
commission Défense nationale-Paix