Austérité et services publics : un couple explosif !

Publié le 20 mars 2024

Le 12 décembre 2023, 89 syndicats des États membres ont organisé une Euro-manifestation à Bruxelles pour dénoncer le retour du pacte de stabilité suspendu pendant la pandémie. L’austérité, et sa règle absurde des 3 % de PIB de déficit public à ne pas dépasser, redevient contraignante. Ce taux, fondé ni de manière théorique ni empirique, redevient la boussole du gouvernement français qui a décidé d’appliquer docilement cette doxa libérale par des coupes drastiques dans les budgets de l’État. La riposte en France aura lieu le 19 mars, où l’ensemble des organisations syndicales de la fonction publique appelle à la grève et aux mobilisations dans tous les départements.

Une démocratie parlementaire piétinée en France et en Europe !

Les dirigeants des pays européens se sont donc entendus en décembre pour trouver un accord en faveur du rétablissement du pacte de stabilité. Pour imposer l’austérité en Europe, le gouvernement français s’est « auto-mandaté » car il n’a aucunement consulté le Parlement – privant une nouvelle fois la population d’un débat démocratique en amont de sa position. Afin d’être entériné ou rejeté, cet accord doit dorénavant suivre son parcours officiel et être soumis au vote du Parlement européen lors d’une séance plénière d’avril. Mais le gouvernement français, fidèle à lui-même, ne s’encombre pas de démocratie ! Bruno Le Maire n’attend pas le résultat de ce vote et annonce la mise en musique en France de ses choix politiques austéritaires : 10 milliards de coupes sombres dans les budgets de l’État immédiatement et 20 milliards l’an prochain – qui s’ajoutent aux 16 milliards déjà spoliés par la loi de finances 2024 imposée par 49.3.

La coupe s’élève donc à 46 milliards d’ici 2027

Le pacte de stabilité contient la fameuse règle très arbitraire du déficit public qui ne doit pas excéder 3 % du PIB. Concrètement, cette règle sert d’alibi aux États membres pour sous financer les services publics afin de les propulser dans le grand bain de la concurrence. Asphyxier, privatiser, externaliser des pans entiers de services publics est une condition pour les soumettre aux lois du marché. Les coupes drastiques dans les budgets des ministères auront des conséquences très claires pour les usagers des services publics, pour les personnels et sur l’emploi public.

C’est d’emblée une fin de non-recevoir pour les revendications salariales des agentes et agents de toute la fonction publique. D’ailleurs, ce refus d’augmenter les salaires a déjà été confirmé par le ministre Guérini aux organisations syndicales. Ce sont aussi les conditions de travail qui vont continuer de se dégrader, car le recrutement va lui aussi être gelé. Donc, que ce soit au niveau de l’école, des hôpitaux ou des collectivités territoriales, le manque criant de personnel va s’aggraver, creusant toujours plus les inégalités et le ressentiment des usagères et usagers.

Et dans sa stratégie globale et opportuniste de casse de notre modèle social et d’attaques frontales contre les droits des salarié·es, le gouvernement a déjà annoncé une nouvelle loi Travail et une nouvelle loi Fonction publique qui prévoient de restreindre les devoirs des employeurs publics et du patronat et d’affaiblir toujours plus les droits des salarié·es. Et cette paupérisation organisée des 5,7 millions de fonctionnaires, conjuguée aux inégalités territoriale, sociale et scolaire accrues, c’est autant de situations d’aubaine pour les forces nationalistes d’extrêmes droites qui instrumentalisent le mécontentement et les frustrations accumulées.

Toutes et tous en grève le 19 mars

Face à ces attaques brutales, l’ensemble des organisations syndicales a construit une riposte par la grève le 19 mars qui s’annonce déjà importante dans l’Éducation – l’intersyndicale du 93 ayant fait de cette journée un temps de fort de sa mobilisation débutée il y a maintenant trois semaines. Les assistantes sociales emboiteront la grève le 22 et les retraités le 26 mars. Le printemps s’annonce social !

Un rapport de force pour porter nos revendications

Réussir ses mobilisations est indispensable pour forcer le gouvernement à renoncer à l’austérité et engager des investissements ambitieux pour renforcer les services publics. Contrairement à ce que laisse entendre B. Le Maire, d’autres solutions sont possibles, basées évidemment sur un partage des richesses : établir une fiscalité plus juste, taxer les grandes fortunes, mettre fin à la gabegie du financement public sans contrepartie des entreprises, mais aussi créer des coopérations européennes pour récupérer les 80 milliards d’argent qui dorment dans les paradis fiscaux, mettre en œuvre une taxe sur les transactions financières.

Faire basculer cette Europe libérale en une Europe de justice sociale, c’est l’objectif premier de notre liste. Car si nous ne nous occupons pas de l’Europe, elle s’occupera de nous !

Sigrid Gérardin

SNUEP-FSU

Article publié dans CommunisteS, n°988, 20 mars 2024.