Missak Manouchian entre au Panthéon le 21 février prochain avec Mélinée. C'est un événement dans notre pays en proie à l'oubli et aux fièvres xénophobes.
Oui, il n’y a pas si longtemps, notre pays a vécu à la première personne l’expérience des extrêmes droites au pouvoir avec Vichy et l’occupation nazie. Oui, face à ce flot d’horreurs, il est des hommes et des femmes qui ont bravé tous les dangers pour que reflue la nuit. Nombreux parmi eux, les communistes ont été jusqu’ici méticuleusement effacés de la mémoire nationale : au Mont-Valérien, là même où la majorité des résistants fusillés étaient communistes, une immense croix de Lorraine gaulliste a été installée par le pouvoir, et jusqu’à l’œuvre récente de Pascal Convert, il n’y avait pas la moindre mention des résistants tombés dès lors qu’ils avaient au cœur cet espoir rouge d’émancipation.
Au Panthéon, la grande famille résistante restait privée de toute sa branche communiste, bien que celle-ci ne fût pas la plus mince aux temps décisifs. (Il est à noter que ces démarches d’exclusion se poursuivent tranquillement jusqu’au sein du service public. Quand France Inter et Philippe Collin veulent honorer les femmes résistantes - démarche si pertinente au demeurant -, ils ne trouvent aucune adhérente du Parti communiste, comme si Marie-Claude Vaillant-Couturier n’était pas digne des ondes nationales, pas plus que Madeleine Riffaud par ailleurs toujours vivante et flamboyante.)
Injustice historique enfin réparée, la panthéonisation du couple Manouchian prend aussi (et peut-être surtout) un sens particulièrement important en ce qu’elle témoigne d’une dimension majeure de la nation française - et du meilleur de la nation française - : la place qu’y ont tenue, qu’y tiennent et qu’y tiendront les étrangers, amoureux de notre Grande Révolution et de ses idéaux. C’est un message essentiel à l’heure d’une xénophobie répandue à jet continu et dont les effets délétères se font sentir chaque jour davantage.
C’est ainsi, avec fierté et ambition, que le Parti communiste entend participer à la place qui est la sienne aux commémorations accompagnant la panthéonisation de Missak et Mélinée Manouchian.
Dans tout le pays, des initiatives vont se tenir, mettant en avant des figures de résistants étrangers engagés parmi les FTP-MOI. À Paris, plusieurs événements sont prévus. Le 5 février, l’exposition Manouchian (d’ores et déjà disponible pour toutes fédérations ou sections) sera inaugurée place du Colonel-Fabien lors d’une soirée qui rassemblera Fabien Roussel, Pierre Ouzoulias, Denis Peschanski, Jean Vigreux, Jean-Pierre Sakoun et Claudie Bassi-Lederman (suivie d’une projection du film consacré à la MOI, « Nous étions des combattants »). Le 9 février, la Fondation Gabriel-Péri proposera au Sénat une grande initiative autour du secteur de la Main-d’Œuvre immigrée, en même temps qu’elle dévoilera son exposition virtuelle. Le 20 février, place du Colonel-Fabien, une soirée mettra à l’honneur Manouchian poète, avec le concours de la revue Europe, avant de donner la parole à artistes, auteurs et historiens qui ont Missak au cœur (de Didier Daeninckx à Serge Wolikow en passant par Gérard Streiff). Le 21, les communistes seront présents en nombre pour cette journée d’hommage national qui parle d’hier mais qui parle tant d’aujourd’hui.
Guillaume Roubaud-Quashie
Publié dans CommunisteS, numéro 979 du 17 janvier 2024.