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Dans la pandémie actuelle de Covid-19, des éléments de langage complotistes ou réactionnaires visent à réduire à l'impuissance et à l'absence d'esprit intelligemment critique. Ces considérations qui se diffusent amplement sur les réseaux sociaux et dans la rhétorique des leaders nationalistes sont souvent plus contagieuses en période de confinement comme celle que nous connaissons et peuvent conduire à des comportements individuels et collectifs cyniques, égoïstes, agressifs, qu'il nous faut tous endiguer pendant que les personnels médicaux combattent le coronavirus.

Cette crise met à nu la nocivité d'une domination capitaliste, et particulièrement financière, des relations et échanges mondiaux. Désormais, toutes les sociétés humaines interagissent avec vigueur et concourent à la transformation du monde et dans ce cadre, plus qu'auparavant, la lutte contre les menaces sanitaire, environnementale et contre les reculs sociaux est devenue déterminante pour la sécurité humaine collective car il ne saurait exister et encore moins perdurer d' «îlots de prospérité et de paix» dans un monde en crise, un océan de misère, de souffrance et d'humiliation alors même que ces espaces «prospères», par leurs choix politiques et économiques, voraces et égoïstes, génèrent des inégalités incommensurables.

La phase actuelle de la mondialisation s'est déployée sous la férule de l'ultra-libéralisme, aux ordres de la finance, affaiblissant voire brisant dangereusement les politiques publiques de santé des États, les systèmes hospitaliers, la recherche scientifique ainsi que les institutions multilatérales; et dans les modes de production et de consommation qu'elle induit, elle provoque un dérèglement climatique et une perte dangereuse de la biodiversité qui sont favorables à la multiplication et l'expansion des coronavirus.

Ces orientations ordo-libérales qui ont relégué à l'arrière-plan les exigences sociales, humains et écologiques sont comptables de l'incapacité, en Europe particulièrement, de faire face à la crise sanitaire. La présidente de la Commission européenne ne dit pas autre chose lorsqu'elle émet le 18 mars l'hypothèse de «suspendre» le Pacte de stabilité; or, c'est de son abandon complet qu'il doit s'agir.

Hors de l'Union européenne, l'Iran est devenu un foyer mondial de diffusion du virus. Cela résulte tout à la fois de la politique de classe et dictatoriale du régime mais aussi des sanctions économiques américaines qui privent les Iraniens des traitements indispensables aboutissant à des contaminations innombrables et à des décomptes macabres effrayants. De ce fait, l'Iran est devenu l'un des pivots de la diffusion du virus au Moyen-Orient.

Il est donc urgent que les sanctions économiques imposées à nombre de pays ciblés par Washington soient immédiatement levées afin que les médicaments, les matériels et, le cas échéant, les personnels de santé coopérants puissent parvenir jusqu'à la population. C'est un besoin immédiat pour l'Iran ou le Venezuela, pour Cuba, ce doit être aussi le cas plus largement pour Gaza et tous les territoires palestiniens, et même la Russie dont le système de santé est déjà déficient.

Dans une tribune récente, le député communiste Pierre Dharréville considère que la pandémie que nous traversons «agit comme un révélateur» de l'état du monde, des logiques dominantes des relations internationales, des choix destructeurs d'ajustements structurels, austéritaires et démultipliés par les pactes de stabilité et autres «règles d'or» imposés aux peuples.

La pandémie du Covid-19 appelle au déploiement de solidarités dans chacun de nos pays, et à l'entraide, à la coopération au plan international.

La santé est un droit humain fondamental, elle doit être considérée comme un bien commun universel et c'est le moment de mettre à l'ordre du jour tant dans nos pays qu'au plan régional et mondial, le soutien déterminé à des politiques de santé publique et de protection sociale offensives reposant sur les piliers de la prévention, des soins, de l'accompagnement et de la recherche.

Dans ce contexte, nous pouvons construire de larges mobilisations pour contraindre la Commission européenne à l'abandon du Pacte de stabilité, à la réorientation du rôle de la BCE, aujourd'hui préoccupée par le sauvetage des marchés financiers, et des fonds voués au «Mécanisme de stabilité».

Le besoin de sortir du cadre marchand le médicament et la recherche médicale est devenu incontournable; il n'est pas question de dépendre plus longtemps de critères de rentabilité dans l'accès aux soins, aux thérapies. L'histoire du traitement du Sida nous l'a pourtant appris: la marchandisation et les concurrence et compétition commerciales dans ce domaine creusent les inégalités économiques et sociales, ne répondent pas aux besoins et vouent à la mort des millions de femmes et d'hommes alors que nous disposons de tous les outils scientifiques et techniques pour les protéger ou prolonger leur vie.

La pandémie qui frappe les pays riches, où les inégalités vont encore s'aggraver dans les mois à venir, ouvre pourtant une brèche aux échelles nationale, régionale et mondiale à des luttes sociales et politiques pour la mise en place de pôles publics du médicament, de santé publique et de protection sociale. Il est grand temps de mettre un terme à tout ce qui entrave l'action des institutions internationales dans leur soutien à des politiques publiques au service des populations, et des forces du travail plutôt qu'à la finance. C'est le moment de donner ses pleins moyens politiques et financiers à l'OMS, qui a été déterminante dans l'éradication de la variole, pour qu'elle joue pleinement son rôle d'appui aux Etats, et atteigne un des objectifs que lui impose sa constitution, celui d'«amener tous les peuples au meilleur état de santé possible» (article 1er), ce qui doit garantir le droit et l'accès universels à la santé et à la protection sociale.

La remise en cause du modèle productif et de développement, et la lutte contre les inégalités socio-économiques dans chacun de pays comme à l'échelle mondiale ne peuvent plus être reportées. La situation pandémique appelle à assurer les droits fondamentaux sociaux et démocratiques et des revenus stables aux travailleurs du monde entier en période de pandémie comme au sortir de la crise. Les prévisions de récession en France provoquent à raison de très fortes inquiétudes en ces temps de crise du capitalisme. Là aussi, une phase nouvelle de la bataille s'engage où les peuples, les forces du travail, peuvent par leur rassemblement et leurs luttes imposer leurs intérêts: protéger leurs droits au cours de cette crise et contrer les tentatives qui ne manqueront pas, au sortir du pic d'épidémie, de leur faire payer l'addition à la place des institutions financières, bancaires, des actionnaires et des milliardaires.

A l'ensemble de ces questions, il ne saurait y avoir de réponses strictement nationales qui permettent de dépasser l'ordre existant mais obligent à des solidarité internationales nouvelles et renforcées. À cet égard, la rhétorique guerrière employée par le chef de l’État pour qualifier la situation ne laisse pas de surprendre et d'inquiéter. En temps de guerre, on réfléchit peu, on réfléchit souvent mal, pris par les émotions et les peurs, les contingences immédiates, l'isolement. En la circonstance, nous luttons pour défendre la santé de tous; c'est dans un tout autre état d'esprit que nous devons nous placer. Parler de guerre aurait pu conduire Emmanuel Macron à considérer que la sécurité sanitaire, la santé publique, sont plus fondamentales que les 2 000 milliards de dollars engloutis à l'échelle mondiale dans les stratégies politico-militaires. Ce ne fut pas le cas et il manque encore à la France un plan d'urgence pour les hôpitaux à la hauteur de la situation.

Les politiques inhumaines de repli, de fermetures des frontières qui viennent d'être adoptées dans l'espace Schengen exposeront les migrants et les réfugiés à la contamination, et à plus d'abandon encore qu'ils ne subissent déjà. Les légitimes dispositions de rapatriement de nos compatriotes des différents continents ne peuvent ignorer l'exigence de solidarité et de coopération avec les pays d'accueil, en particulier en Afrique de l'Ouest pour nombre de ressortissants français, pour endiguer et enrayer la pandémie dans les pays touchés ou qui vont l'être.

Dans un monde interdépendant, si l'on veut gagner le combat contre la maladie et amorcer des processus transformateurs qui libèrent les individus et sociétés des logiques de domination et d'exploitation capitalistes, ce ne peut être «contre» ou «en ignorant l'autre».

Il n'y a pas d'autres voies que de gagner ensemble. Cela demande du courage qui, lui aussi, est contagieux mais constitue un espoir.

 

Le secrétariat d'animation du secteur International