« L’Amérique prête à guider le monde », vraiment ?

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Mardi 24 novembre, Joe Biden, le président élu des États-Unis, pas encore installé à la Maison Blanche, a présenté une partie de son équipe. Ils ont évoqué ensemble leur vision du monde. "Le multilatéralisme est de retour, la diplomatie est de retour", a affirmé la future ambassadrice américaine auprès de l'ONU, Linda Thomas-Greenfield. "Nous ne pouvons pas résoudre seuls les problèmes du monde", a déclaré Antony Blinken, futur chef de la diplomatie. La crise climatique, « menace existentielle » a été abordée, avec la promesse d’un retour dans l’Accord de Paris et la perspective prétendue d’une neutralité carbone en 2050. Voilà qui contraste avec l’ère de Donald Trump qui s’emploie à mener jusqu’en janvier prochain une politique de la terre brulée, à l’intérieur comme à l’extérieur comme en atteste la provocation de la présence du secrétaire d’État sortant Mike Pompéo dans une colonie israélienne, au Golan ou encore en Arabie Saoudite avec le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou pour cibler l’Iran…

Au-delà des déclarations de la nouvelle équipe destinées à marquer une rupture, Joe Biden a résumé l’essentiel en une phrase : "l'Amérique est de retour, prête à guider le monde". Il y aura donc du changement pour espérer que, selon la vision US, rien ne change. Les États-Unis sont hégémoniques, ils n’imaginent pas de modification de l’ordre du monde et ne comptent qu’adapter à la marge leur logiciel.

Mais ce dernier est-il en phase avec une planète en plein bouleversement ? Peut-il répondre aux crises écologiques, économiques, sanitaires, démocratiques ? Le monde se complexifie et est davantage multipolaire. Il ne s’agit plus de choisir un camp et de se ranger derrière un guide, d’autant plus si celui-ci est en perte de vitesse et de crédibilité. Le plus vaste accord de libre-échange au monde, signé par la Chine, qui engage 15 pays d’Asie et du Pacifique, ne vient-il pas de naître en dehors des États-Unis ?

Guider le monde, pour faire quoi ? Les promoteurs du capitalisme financier générateur de chaos, s’arcboutent pour élargir toujours plus leurs pouvoirs et leurs richesses. Ils sont par définition incapables de répondre aux défis et se trouvent devant des contradictions indépassables. Ce contexte favorise des replis nationalistes, identitaires, les obscurantismes religieux ou d’extrême droite, qui trouvent d'étonnantes promotions, alors qu'ils sont sans solution et mortifères pour les peuples, parce qu'ils servent à reléguer les confrontations de classe pourtant bien présentes et à empêcher les nécessaires alternatives.

A l’opposé de ce chaos et des violences induites, il faut proposer et construire une visée. Celle partagée majoritairement par des femmes et des hommes qui aspirent partout à vivre mieux, en paix, sécurisés avec des systèmes solidaires de protection sociale, avec de nouveaux droits et de nouveaux modes de production et de consommation. C’est ce monde qui résiste, par lutte ou par la nécessité de notre époque, qui peut ouvrir des perspectives de progrès et donc post-capitalistes. Perspectives qui correspondent à ce que nous appelons pour notre part la visée communiste.

Bien loin de ces conceptions de progrès, l’arrivée cette semaine à l’Assemblée nationale du projet trompeur de réforme du Franc CFA, qui vise à entretenir et élargir la domination monétaire et économique des pays concernés, sonne comme l’aveu d’une France officielle qui voudrait encore guider l’Afrique. Vraiment ?

Dominique JOSSE
membre de la commission international et du collectif Afrique du PCF