L’explosion de l’économie numérique appelle de nouvelles réponses internationales

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Cela fait maintenant un certain temps que l’on parle de l’incroyable augmentation des profits des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), en particulier depuis la crise de la COVID. Les résultats de ces multinationales sont impressionnants, elles ont profité de la fermeture des petits commerces et du développement de la numérisation de la société.
Leur chiffre d’affaires a explosé et le sujet de la taxation des géants du numérique qui avait été bloqué par Donald Trump revient dans les sphères internationales avec le nouveau président américaine, Joe Biden.

Une réponse internationale à cette abondance de profit qui passe souvent dans les trous de la raquette de la fiscalité est indispensable.

Cependant, nous ne pouvons que constater que les institutions internationales, les institutions européennes sont en grande difficulté pour y répondre et cela malgré les déclarations de certains grands patrons comme Jeff Bezos (Amazon) qui déclare, il y a quelques semaines, qu’il est d’accord pour être davantage taxer.

Cette bataille nécessaire d’imposition des profits hallucinants des GAFAM ne cacherait-elle pas une autre lutte beaucoup moins publique et beaucoup moins consensuelle : celle du bouleversement de monde du travail en raison du développement des plateformes numériques, celle de l’effacement de la frontière entre salarié et travailleur indépendant, celle de la nécessité de réponse politique internationale cohérente pour répondre à ces nouveaux défis pour les travailleurs et les entreprises.

Défis pour les travailleurs qui ont besoin de réponses pour accéder aux droits sociaux, à la régularité du travail et des revenus, aux droits à la liberté syndicale, à la négociation collective… Défis pour les entreprises, en particulier les PME qui font face à une concurrence déloyale contre laquelle elles ne peuvent pas lutter et qui doivent affronter les difficultés d’investissements pour accéder aux infrastructures numériques.

La nécessité de trouver des réponses internationales cohérentes à ces nouvelles inégalités qui explosent à cause du développement des plateformes numériques est le sujet d’un rapport de l’Organisation internationale du travail (OIT).
Selon ce rapport d’avril 2021, « Emploi et questions sociales dans le monde 2021 : le rôle des plateformes numériques dans la transformation du monde du travail », la fracture numérique est multiple et aggrave les inégalités.

Tout est bousculé par cette économie, le monde du salariat ou se confond salariés et travailleurs indépendants, la « mondialisation » de l’emploi…. Par exemple, PeoplePerHour, une plateforme de travail indépendant compte environ 50 salariés alors qu’elle sert d’intermédiaire pour le travail de 2,4 millions de personnes dans le monde entier. Comment harmoniser et donner des droits à tous ces travailleurs ?

Autre sujet d’inégalités, la répartition mondiale des investissements dans les plateformes numériques et leur chiffre d’affaire.

Environ 96% des investissements dans les plateformes de travail numérique sont concentrés en Asie, en Amérique du Nord et en Europe contre 4% en Amérique latine, en Afrique et dans les États arabes. Ainsi, 70% des recettes de cette économie sont concentrés dans deux pays seulement, les États-Unis (49%) et la Chine (23%).
Sur les plateformes en ligne, les tâches sont sous-traitées par des entreprises qui se situent dans les pays du Nord et qui sont effectuées par des travailleurs se trouvant dans les pays du Sud qui sont moins bien rémunérés que leurs homologues des pays développés.

De plus, d’après l’enquête de l’OIT, une majorité des travailleurs des plateformes numériques n’ont pas de couverture sociale.

Ces nouvelles fractures numériques n’ont pas de frontière et imposent une cohérence politique internationale et de nouveaux droits pour des travailleurs salariés ou indépendants, ces réponses font partis des défis d’un monde plus juste, plus durable auxquels les partis politiques de gauche doivent trouver des réponses.


Cécile Dumas
responsable-adjointe du secteur international
chargée des politiques migratoires