Avec les accords de Pretoria et de Nairobi sous l'égide de l'Union africaine (UA), l'Éthiopie semble avoir retrouvé le chemin de la paix.

Certes, ce chemin sera sans doute long mais le canon ne tonne plus. L'acheminement de l'aide alimentaire et sanitaire a pu commencer, les installations électriques et les transports fonctionnent. Les écoles ont, à nouveau, ouvert leurs portes.

Il y a quelques jours, le Premier ministre éthiopien a rencontré les responsables tigréens afin de faire le point sur l'accord de paix et envisager l'avenir. Et, par ailleurs, Soudan et Éthiopie viennent de signer un accord pour la gestion du barrage Renaissance.

Lors de leur récente visite conjointe à Addis-Abeba, les ministres française et allemande des affaires étrangères ont qualifié de positifs les débuts de l'application de l'accord de paix. Il reste une question à résoudre pour que le travail de reconstruction et de réconciliation se réalise pleinement, c'est d'exiger que les troupes érythréennes se retirent du Tigré. Sans cela, les sources de tension pourraient persister.

Dans ce processus de paix, la France pourrait assurer un rôle déterminant dans l'aide au développement dont l'Éthiopie a besoin, notamment dans le domaine de l'agriculture et de l'élevage. La paysannerie française (lire le numéro spécial de La Terre) a une riche expérience dans ce domaine. Elle pourrait apporter toute son expertise afin d'aider aux progrès de l'agriculture et de l'élevage en Éthiopie, par exemple en accueillant des étudiants éthiopiens dans nos lycées professionnels ou en soutenant l'enseignement agricole au pays.

Ce type de coopération pourrait aider l'Éthiopie à atteindre l'auto-suffisance et à garantir sa souveraineté alimentaire. Aujourd'hui, selon l'ONU, 12 millions d'habitants sont en situation de sous-alimentation. Cela constituerait un élément concret et durable de l'unité nationale indispensable à ce pays pour vivre en paix. L'Éthiopie pourrait alors cesser de vendre ou de louer des terres à l'agro-business internationale, un facteur de trouble intérieur. 50 millions d'hectares de terres arables en Afrique sont actuellement la propriété de l'agro-business internationale, selon Kako Nubukpo, auteur de Une solution pour l'Afrique. Du néoprotectionnisme aux biens communs (Éd. Odile Jacob, 2022).

La part de la diplomatie dans ce processus de paix, qui est en soi une victoire, a été essentielle. Alors, pourquoi ce qui a été possible dans ce conflit, l'un des plus meurtriers pour l'Afrique, ne le serait-il pas pour la guerre en Ukraine ?

Certains diront que les causes ne sont pas les mêmes et ils auraient raison, mais une guerre reste une guerre, lourde de pertes humaines, d'actes indicibles de cruauté et de souffrance. La France doit cesser d'être à la remorque des États-Unis et prendre l'initiative diplomatique d'une solution politique à ce dangereux conflit qui, au regard des engrenages successifs, ne peut conduire qu'au pire, voire à une troisième guerre mondiale.

En s'appuyant sur les opinions publiques et sur des pays comme la Chine, l'Inde et certains pays africains, il serait possible de construire un mouvement planétaire pour la paix.

Dans une récente intervention à la tribune du Sénat, l'un de ses vice-présidents, Pierre Laurent, interpelait à juste titre le gouvernement : « N'abandonnons pas l'exigence d'un cessez-le-feu le plus vite possible : ce n'est pas céder aux Russes, c'est demander que la voix de la paix ne s'éteigne pas. Nous appelons au retour de la diplomatie pour tracer le chemin d'une négociation globale. »

La diplomatie ne devrait pas quitter les relations internationales. Il ne s'agit pas d'une attitude seulement raisonnable mais d'une obligation pour qui veut construire et aboutir un jour à une sécurité humaine globale sur Terre.

Daniel Feurtet
membre du collectif Afrique
et de la commission des relations internationales du PCF