Le projet communiste – Extraits du rapport de Christian Picquet

De ce panorama, nous retirons en premier lieu une confirmation : le projet communiste n’a jamais été d’une telle actualité. C’est la quatrième question, fondamentale, que développe le texte.

Parce que la planète a plus que jamais besoin d’une révolution écologique, le projet communiste affiche l’ambition de rendre vivable sa relation avec la niche écologique qu’elle occupe.

Parce que nous sommes confrontés à de lourdes tendances au repli et à la fragmentation des sociétés, il porte l’enjeu de la mise en commun.

Parce que la révolution technologique en cours met à l’ordre du jour le partage des informations, des savoirs et des pouvoirs, il affiche la perspective de dépasser le marché capitaliste.

Parce que l’universalité de la défense des droits humains s’exprime en une multiplicité de mouvements populaires, il porte l’émancipation individuelle et collective comme une absolue nécessité pour le bien commun de toute l’humanité.

Parce qu’il y a besoin de révolution des relations entre générations, de révolution du travail, de révolution de la politique autant que de la culture, il est un projet anthroponomique. C’est-à-dire un projet qui lie indissolublement économie et écologie, social et sociétal, dans la perspective d’arracher le pouvoir au capital.

Parce que s’exprime partout la soif de retrouver la maîtrise de l’avenir et des décisions prises, il fait de la démocratie jusqu’au bout le but et le moyen du combat révolutionnaire.

Comme l’avait déjà relevé le 38e Congrès, le communisme est en même temps horizon civilisationnel et chemin de lutte. 

Horizon civilisationnel, dès lors qu’il veut conduire au dépassement du travail, de l’argent, des nations, de l’État…

Chemin de lutte, au sens où, si des éléments de communisme ne cessent de surgir des contradictions mêmes du système, il y a besoin d’une force révolutionnaire pour changer le rapport des forces, articuler les combats contre toutes les dominations à la bataille de classe pour en finir avec l’exploitation, car telle est la condition pour parvenir au dépassement du capitalisme.

C’est ce qui fait le besoin d’un Parti communiste plus fort, plus influent, mieux implanté.

En ce sens, le projet communiste irrigue toutes les dimensions de notre action, il leur donne sens.

Précisément, c’est la cinquième question abordée par le projet, de cette cohérence découle une démarche pour l’action.

Contrairement à ce que nous avions fait au précédent congrès, et dans d’autres encore antérieurement, nous vous proposons de ne pas développer une partie « programmatique » dans le texte de cette base commune.

Nous avons, en effet, voté au conseil national de décembre dernier un programme en 180 propositions, « La France des Jours heureux », que les communistes se sont largement approprié tout au long de la campagne de la présidentielle.

Nous en avons repris les grands axes pouvant structurer notre activité.

D’abord, engager une révolution du travail, de la production, de la consommation. En son cœur, se situent les batailles corrélées pour éradiquer le chômage par un système de sécurisation de l’emploi et de la formation, pour changer le sens du travail lui-même ainsi que le mode de production des richesses, pour ouvrir une perspective à la jeunesse, pour aller vers une nouvelle industrialisation de la France.

Ensuite, la promotion des biens communs par le service public. Toutes les confrontations de la dernière période en confirment l’actualité. J’ai parlé tout à l’heure de la souveraineté énergétique, qui passe par un mix nucléaire-renouvelable à 100 % public. Il faut, naturellement, y ajouter tout ce qui relève de la santé, de l’éducation, du droit au logement, les transports, la communication, ou l’accès aux arts et à la culture.

Enfin, l’objectif d’une nouvelle République. 

Dans ce cadre, nous voulons articuler de nouvelles institutions politiques replaçant le peuple au cœur des décisions, ce qui implique la fin du système présidentialiste et une VIe République, avec la conquête de nouveaux pouvoirs de décision pour les salariés à l’entreprise. 

C’est l’originalité de nos propositions que de lier indissolublement souveraineté du peuple et souveraineté du travail. 

Et c’est également leur originalité que de vouloir nourrir ce processus de révolution démocratique du combat féministe pour l’égalité, ou encore de la lutte contre toutes les discriminations, contre le racisme et l’antisémitisme, contre les atteintes aux droits des personnes LGBTQI. 

Et c’est encore une autre originalité, au sein de la gauche, que de lier ces grands objectifs transformateurs aux moyens de les financer et d’acquérir une nouvelle efficacité économique. Ce qui passe par une autre utilisation de l’argent public, de l’argent des banques et des entreprises, par l’appropriation sociale et démocratique des grands réseaux bancaires et des groupes dominants des secteurs stratégiques.

Il se pose encore à notre débat de congrès la question de la stratégie à même d’inverser le rapport des forces dans le pays, afin de bâtir une majorité politique au service de la transformation sociale et écologique. C’est le sixième point de discussion qu’ouvre le texte.

Le problème, en l’occurrence, ne peut se résumer aux alliances à nouer entre forces politiques de gauche et écologistes.

Il importe d’abord de s’interroger sur le sujet de la révolution que nous appelons de nos vœux. Ce sujet, c’est le monde du travail dans sa diversité. 

Il est le socle social et politique du changement, parce qu’il représente les forces vives d’une nation comme la nôtre, et parce que sa place dans l’économie, autant que puissance potentielle, lui confère les moyens d’unir autour de lui toutes les forces disponibles au dépassement des logiques capitalistes.

Cette appréciation, on le voit bien, nous distingue des autres courants de la gauche. 

Elle nous amène à considérer que l’objectif premier, dans le moment que nous traversons, doit être de retrouver le chemin de ces millions d’hommes et de femmes qui font présentement défaut à la gauche pour les unir, car sans eux aucune majorité sociale et politique n’est imaginable. 

C’est pour engager cette reconquête que nous nous fixons l’objectif de construire une dynamique populaire agissante. 

Engagement dans les luttes, recherche de convergences entre organisations du mouvement social et forces politiques dans le respect des spécificités de chacune, bataille d’idées : tels sont les moyens de la construction due à cette dynamique.

Et c’est toujours pour concourir à cette reconquête que nous voulons débattre avec nos partenaires de gauche. 

Nous les appelons à engager cette bataille, tous ensemble, de la remobilisation des forces du travail, seul chemin possible pour gagner demain et seul moyen de barrer la route du pouvoir à l’extrême droite.

La discussion, en l’occurrence, ne porte pas sur la participation à la Nupes. 

Notre ADN, c’est le rassemblement de la gauche et des forces populaires. 

Nous voulons, dès lors, chercher systématiquement l’unité d’action, sur la base d’un accord partagé sur les contenus et sur les initiatives. 

C’est ce que nous faisons en échangeant régulièrement avec les autres partis, ou en travaillant au sein de l’intergroupe qui s’est constitué à l’Assemblée nationale.

Pour autant, la coalition formée pour les législatives ne saurait se transformer à présent en un nouveau mouvement politique, ou en une fédération, telle que la perspective en a été avancée par La France insoumise au lendemain des législatives. 

Des différences existent. Elles portent sur des sujets importants : le programme, la stratégie, les relations à nouer entre forces de gauche.

Ces points appellent un débat loyal, fraternel, public. 

Un débat dégagé des volontés hégémoniques qui sont un obstacle au développement du mouvement populaire et qui empêchent la gauche de porter une alternative à visée majoritaire. Nous l’avons encore vu, ces dernières semaines, lorsque les tentations hégémoniques ont provoqué de fortes tensions avec les organisations syndicales, alors qu’il y avait urgence à développer une convergence pour les salaires, l’emploi ou la défense du droit à la retraite.