Le Secours rouge international – La solidarité par-delà les frontières (4)

La solidarité internationale, expression concrète de l’internationalisme prolétarien, est au cœur du projet du SRI. Sa section française, engagée dans la défense du droit d’asile, est spécialisée dès sa fondation dans l’accueil des exilés révolutionnaires italiens, hongrois ou polonais puis, dans les années 1930, des antifascistes allemands et espagnols. 

Dans les années 1920, la France est l’un des épicentres de la solidarité avec le mouvement ouvrier et démocratique des pays d’Europe de l’Est et des Balkans frappé par la « terreur blanche ». Alors que de grands procès politiques sont diligentés contre les organisations communistes, le Secours rouge déploie d’importants moyens d’agitation et de propagande pour interpeller les gouvernements et mobiliser l’opinion publique internationale. Il sollicite pour cela, sous la supervision d’Henri Barbusse, le concours d’intellectuels de sensibilités politiques variées et envoie ses avocats les plus renommés à l’étranger.

Le Secours rouge est propulsé sur le devant de la scène médiatique à l’occasion de la mobilisation contre la condamnation à mort aux États-Unis de Sacco et Vanzetti. Malgré la concurrence des libertaires, qui ont formé avec les socialistes un Comité de défense Sacco-Vanzetti, la section française du SRI renforce son influence en démultipliant les moyens d’action engagés. Tandis que les meetings et manifestations font le plein et réunissent des dizaines de milliers de participants, le Secours rouge prend la tête d’une ultime délégation à l’ambassade américaine le 22 août 1927. En vain, puisque la nouvelle de l’exécution des deux anarchistes italiens parvient le lendemain au peuple ouvrier de Paris, qui laisse éclater sa colère dans une émeute d’une rare intensité. « Leur mémoire crie vengeance », clame alors le SRI en appelant à amplifier le combat contre la répression.

Dans les années suivantes, les États-Unis, en proie au suprématisme blanc, restent la cible du Secours rouge, qui dénonce le développement des violences racistes « au pays du dollar, de la chaise électrique et du lynchage ». La campagne internationale qu’il mène au moment de l’affaire des « Scottsboro Boys » parvient à empêcher l’exécution de neuf jeunes noirs injustement condamnés à mort en Alabama en 1931.

Après l’arrivée au pouvoir d’Hitler en Allemagne en 1933, le SRI concentre une large part de son activité dans le soutien aux antifascistes victimes de la répression nazie. Il mobilise ses réseaux pour organiser le transfert et l’accueil de centaines de réfugiés politiques ciblés par le nouveau régime. L’un de ses avocats, Marcel Willard, se rend en Allemagne pour participer à la défense de Georges Dimitrov et des accusés de l’incendie du Reichstag, tandis que le SRI anime, aux côtés d’intellectuels, le comité pour la libération d’Ernst Thaelmann (dirigeant du Parti communiste d’Allemagne).

En 1934, à la suite de l’écrasement en Autriche de l’insurrection ouvrière de février, le Secours rouge envoie à Vienne une délégation de femmes chargées d’aider les familles des emprisonnés. Quelques mois plus tard, lors de la défaite de la Commune des Asturies, il constitue des Comités populaires d’aide aux victimes du fascisme en Espagne, qui accueillent des centaines de syndicalistes et de révolutionnaires échappant à la répression. Cette expérience de solidarité internationale, qui participe alors en France du renforcement de la dynamique antifasciste unitaire, sera réitérée à partir de 1936, à une échelle beaucoup plus grande, au moment de la guerre d’Espagne.

Corentin Lahu

Crédit illustrations : Archives nationales, BMP/Pandor