Stop aux expulsions locatives !

Les expulsions locatives sont la face émergée de l’indignité de la politique du logement en France. 

En avril prend fin ce que l’on nomme avec pudeur la « trêve hivernale ». Recommence alors le cycle infernal des expulsions, dont le nombre non officiel était estimé à 18 000 en France il y a trois ans.

L’expulsion est une pratique barbare qui nie le droit au logement, pourtant reconnu par le pacte des droits sociaux des Nations unies ratifié par la France, qui consiste à ouvrir la porte d’un habitant contre son gré, à vider son logis de toutes ses affaires, les placer sans ménagement dans un lieu de stockage, et le laisser lui et sa famille quand il en a une, sur le trottoir devant chez lui après avoir condamné la porte. Le tout réalisé par la police, avec mandat du préfet. Une horreur.

Depuis des années, les élu.e.s communistes ont mené une bataille citoyenne et juridique contre les expulsions. Ce fut d’abord avec les arrêtés anti-expulsions, qui étaient immédiatement cassés par les tribunaux administratifs. Leur ont succédé, depuis trois ans, les arrêtés anti-mise à la rue, qui prennent acte de la décision du Préfet d’expulser, mais lui imposent, en tant que garant de l’Etat et du droit au logement, d’assortir sa décision d’une solution de relogement, pour empêcher qu’une décision de justice ait pour conséquence de mettre des personnes à la rue.

Les tribunaux administratifs ayant continué à statuer dans le même sens, il a été décidé, cette année, d’aller s’il le fallait au conseil d’Etat. Mais on voit bien que l’on est au bout d’une démarche, et qu’il convient désormais de réorienter la bataille, en la replaçant dans le contexte plus large de l’indignité des politiques du logement en France.

C’était le sens de l’Appel d’Aubervilliers, lancé par sa maire l’été dernier après deux drames liés à l’habitat indigne. Il y était rappelé la contradiction majeure portée par le logement entre sa qualité de droit fondamental et celle de bien marchand qui en fait l’objet de spéculations.

Il convient de dépasser cette contradiction, en inversant la priorité donnée au droit à la propriété sur le droit au logement.

Aujourd’hui, trop de gens - 900 000 - attendent un logement sans que leur soit proposée une solution. C’est insupportable.

Trop de gens payent un loyer trop cher qui réduit d’autant leur pouvoir d’achat. Le logement est parmi les dépenses contraintes celle qui a le plus augmenté sans gain qualitatif. C’est insupportable.

Trop de gens - 2 millions de personnes - vivent dans des conditions indignes, souvent à la merci de marchands de sommeil, mettant en péril leur santé et leur sécurité. C’est insupportable.

Et il est bien sûr insupportable qu’en bout de chaîne on puisse craindre voir 20 000 expulsions être réalisées par les représentant de l’Etat en 2019.

Le logement n’est pourtant pas un sujet qui échappe aux pouvoirs publics. Mener des politiques pour sortir de cette situation est possible. Ainsi les maires communistes de la région parisienne ont-ils réclamé, à l’automne dernier, que soit appliqué immédiatement le volet de la loi récemment adoptée concernant l’encadrement des loyers. L’expérience parisienne portée par Ian Brossat à Paris pendant trois ans avait démontré la possibilité de contenir les prix.

Mais la principale mesure à envisager, et là aussi Ian Brossat a prouvé à Paris que la volonté politique le permettait, reste bien entendu de relancer une construction massive de logements publics. A l’opposé de ce que fait ce gouvernement, à qui il est temps que nous fassions entendre raison. µ

 

José Moury, élu à Bobigny, animateur du collectif logement de l’ANECR.

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