Mettre l'ONU hors jeu, c'est renoncer à bâtir un monde de paix

Dans ces moments troublés où les idées nauséabondes, fascisantes, tendent à progresser ici et là, où les risques de confrontation militaire qui opposeraient les pays de l'OTAN à la Russie se renforcent chaque jour, où les inégalités atteignent de nouveaux records chaque année, où des centaines de migrants trouvent la mort sur les routes de l'exil vers l' « Europe forteresse », notre responsabilité est de construire les bonnes réponses à une situation internationale grave mais qui n'a rien d'inexorable.

Dans les débats médiatiques, il manque cependant toujours un absent d'importance – systématiquement mis à l'écart : l'Organisation des Nations unies (ONU), son secrétaire général Antonio Guterres.

Prenons le sort fait aux migrantes et migrants. Comment sortir de cette crise qui n'est rien d'autre qu'une crise de l'accueil de l'Union européenne (UE) ?

Bien sûr, il convient d'exiger l'ouverture de couloirs de migration sécurisés et légaux, de développer des politiques d'accueil, de poursuivre et condamner les passeurs, de faire, en bref, le choix de l'hospitalité. Mais, plus fondamentalement, les pays membres de l'UE, et beaucoup d'autres dans le monde malheureusement, doivent appliquer la Déclaration universelle des Droits humains de décembre 1948, laquelle constitue un des fondements des Nations unies.

Aux termes de l'article 13, alinéa 2, de la Déclaration : « Toute personne a le droit de quitter son pays y compris le sien et revenir dans son pays ». Oui, la liberté de circulation est un droit humain fondamental. En vertu de son article 14 : « Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l'asile d'autres pays ». Il ressort de ces dispositions la liberté de circulation et d'installation des femmes et des hommes à travers le monde. Il n' y a pas d'étrangers sur terre. N'est-ce pas là parmi les éléments clés de la vision d'un communisme du 21e siècle ?

Prenons la situation actuelle entre l'OTAN et la Russie. L'OTAN n'est pas une organisation défensive mais une organisation de guerre qui agit le plus souvent en dehors du droit international (comme elle le fit en Yougoslavie) et donc, sans l'accord des Nations unies. Comme nous le proposons, l'OTAN doit disparaître pour être remplacée par des cadres communs et inclusifs de sécurité collective et de coopération.

Tout en privilégiant les rencontres bilatérales, les grandes puissances organisent leurs G7 ou G20 en dehors de toute institution multilatérale légitime. Elles écartent ainsi tout ce qui fait l'essence des Nations unies, incarnée par son secrétaire général au terme de l'article 100 de la Charte de l'ONU.

Les interdépendances, ce monde où « tout le monde a besoin de tout le monde », appellent à un rôle renforcé de l'Assemblée générale des Nations unies et à une réforme de son Conseil de sécurité. L'ONU est vitale pour qui œuvre à la paix au plan international.

Dans son dernier livre Les puissances mondialisées, repenser la sécurité internationale, Bertrand Badie écrit : « En bref, la sécurité n'est plus « nationalisable » comme elle l'était hier : la vulnérabilité se conçoit désormais de façon globale au travers de l'humanité tout entière ». Et l'ONU, son secrétaire général, ses différentes agences, sont les acteurs et instruments incontournables d'une sécurité humaine collective.

Daniel Feurtet,
membre du collectif Afrique
membre de la Commission des relations internationales du PCF