Algérie : Liberté pour les prisonniers politiques du Hirak

L’Algérie aura encore vécu une année exceptionnelle depuis le déclenchement du Hirak. Reflet d’une modernité radicale, créative et pacifiste, cet immense mouvement pour la dignité et la justice n’a eu de cesse de réclamer un changement profond de système, le respect des droits humains, la liberté, une transition démocratique, un processus constituant et l’édification d’un État de droit. Il a provoqué le départ du président Abdelaziz Bouteflika et seule l’épidémie de Covid-19est parvenue à l’endiguer.

Le pouvoir a cru trouver dans cette pandémie l’espoir d’un répit, mais rien n’y fait car les crises s’enchaînent et s’accumulent. Les contaminations croissantes, ces dernières semaines, ont révélé l’ampleur des défaillances du système sanitaire, accentuant des difficultés économiques antérieures. Tous les voyants sont désormais au rouge : chute du PIB, des recettes fiscales et celles liées aux hydrocarbures, déficit de la balance commerciale… À cela s’ajoute une intensification de la crise politique. L’appel au boycott du scrutin présidentiel et de la réforme constitutionnelle, massivement suivi, ont constitué un camouflet pour un pouvoir jugé illégitime. De plus, le président Abdelmajid Tebboune, un homme du sérail adoubé par l’armée, est hospitalisé en Allemagne depuis le 28 octobre.

Cette vacance du pouvoir, qui rappelle un air de déjà vu, empêche la ratification de la nouvelle Constitution et le vote du budget. Tout ce système, à bout de souffle, est dans l’impasse.

Face à ce cette situation, le pouvoir, qui ne veut rien concéder à la démocratie, joue le pourrissement et la répression afin d’entraver par tous les moyens le déconfinement du Hirak qui couve. Jamais, depuis la décennie noire, l’Algérie n’avait connu un nombre si élevé d’arrestations, et l’escalade se poursuit contre la société civile, les militants pacifistes, les journalistes afin de museler la presse, les médias, étouffer les libertés publiques et briser les voix discordantes. La justice est tout entière subordonnée et instrumentalisée par le pouvoir.

« Les communistes français expriment leur solidarité avec le peuple algérien. »

Un nombre considérable d’acteurs du Hirak ont été ciblés, interpellés, incarcérés et condamnés. Quatre-vingt-dix d’entre eux croupissent toujours en prison, comme l’emblématique journaliste Khaled Drareni (2 ans), Yacine Mebarki (10 ans pour incitation à l’athéisme), Abdellah Benaoum (3 ans pour outrage au président), le poète Mohamed Tadjadit (dix chefs d’inculpation), le peintre Abdelhamine Amine (2 ans), le journaliste de radio Sarbacane Abdelkrim Zeghilèche (2 ans)… D’autres ont été libérés après de longues périodes d’emprisonnement, comme le leader de l’UDS Karim Tabbou, Samira Messouci, Nour El Houda Oggadi, Samir Belarbi, Slimane Hamoutouche…

Le soutien d’Emmanuel Macron au président A. Tebboune, dans une interview à Jeune Afrique, a suscité chez tous ces militants de la colère, donnant ainsi le sentiment d’une caution à l’arrogance de ce pouvoir.

Dans le respect de l’indépendance de ce soulèvement populaire, les communistes français expriment leur solidarité avec le peuple algérien. Ils appellent à l’arrêt de la répression, à la libération immédiate des prisonniers et à la réhabilitation de ceux qui ont été injustement inculpés et condamnés.

Pascal Torre
responsable-adjoint du secteur international du PCF
chargé du Maghreb et du Moyen-Orient