Coronavinus : pourquoi fermer les frontières ?

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Face à l’extension de l’épidémie du Covid-19, le 16 mars, Emmanuel Macron annonce lors de son allocution télévisée la fermeture des frontières à l’entrée de l’Union européenne et de l’espace Schengen. Cette annonce fait suite à celle de différents pays de fermer leurs frontières aux citoyens européens comme les États-Unis, l’Israël, le Kazakhstan, Le Liban, la Jordanie, le Salvador, le Guatemala mais aussi à l’Italie, l’Allemagne ou la Suisse qui avaient pris des mesures de soi-disant préventions….

Les pays se renferment derrière leur frontière. Comment et pourquoi ces décisions ?

On peut réellement se poser la question d’autant que le mot fermeture est plus facilement prononcé que confinement et les décisions ne paraissent ni concertées, ni homogènes et oublier la nécessaire solidarité européenne et internationale.

Par exemple, le Canada décide assez tôt de fermer ses frontières à tous les étrangers sauf aux américains. Les États-Unis ferment leur frontière à tous les européens sauf aux britanniques….

Alors la fermeture des frontières a-t-elle une raison scientifique, sanitaire ou purement politique ?

Il est d’autant plus important de se poser cette question car les décisions de fermeture des frontières ont été prises pour la plupart après l’annonce de l’OMS de désigner le Covid-19 comme une pandémie mondiale.

Fin février, « des experts » jugeaient que fermer les frontières dans l’espoir de se prémunir contre l’arrivée du virus était inefficace, tout comme les contrôles sanitaires à la frontière. Affirmation exprimée aussi par le commissaire européen à la gestion des crises tout en signalant que la fermeture des frontières pourrait avoir des conséquences graves comme par exemple pour le système de santé de la Suisse qui fonctionne avec une partie importante de travailleurs frontaliers vivant en France.
Cette décision de fermeture des frontières ne fait pas partie des mesures recommandées par l’OMS et semble bien une décision à haute visibilité politique.

Le 12 mars, le conseil scientifique auquel Édouard Philippe et Emmanuel Macron font souvent référence pour justifier leurs annonces écrit dans son rapport qu’il n’identifie pas d’argument scientifique en faveur d’un impact de la fermeture des frontières sur l’évolution de l’épidémie. Il continue en écrivant que dans un contexte d’épidémie généralisée en France, la fermeture des frontières n’aura pas d’impact notable sur les chaînes de transmission qui sont locales.

Allons un peu plus loin, la fermeture des frontières, nous le savons, créer des promiscuités et des surpopulations dans de terribles conditions de vie propices à la propagation du Covid-19. C’est le cas dans les camps de réfugiés en Grèce, c’est le cas en Turquie, c’est le cas en France dans les campements autour des grandes villes…. Et cela, le gouvernement n’en parle pas, ne s’en soucie pas !

Comment pourrions-nous contenir une épidémie à Lesbos, Chios, Samos ou autres endroits ? Sûrement pas en fermant les frontières dans l’espace Schengen.

Cette crise sanitaire mondiale ouvre évidemment de nouvelles questions et il serait dangereux de surfer sur le seul sentiment « nationaliste » de repli sur soi. Emmanuel Macron a dit qu’il aurait un avant et après coronavirus, c’est certainement vrai mais il est important de rester vigilant, attentif aux arguments ou à des mesures coercitives y compris la proclamation d’un état d’urgence qui n’auraient pas de sens et qui ne feraient qu’aggraver les inégalités.

Alors restons chez nous mais restons vigilants !

Cécile DUMAS
responsable-adjointe du secteur international
chargée des enjeux migratoires