Discours du PCF - Plaque commémorative du Président Hô Chi Minh à Marseille

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Votre Excellence Monsieur l'Ambassadeur,

Monsieur le consul honoraire,

Madame la maire, chère Audrey, représentante du maire de Marseille

Madame la maire de secteur,

Monsieur le sénateur,

Monsieur le maire,

Mesdames et messieurs les conseillers municipaux,

Chers amis et camarades,

Mesdames et messieurs,

C'est avec une particulière émotion que je prends la parole devant vous au nom de Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français – dont je vous prie d'excuser l'absence.

Oui, une particulière émotion parce que l'hommage que nous rendons ce matin au président Ho Chi Minh avec l'inauguration de cette plaque commémorative sur l'immeuble de la Marseillaise et, ici, sur le port de Marseille, nous le devons à un grand dirigeant du PCF et fidèle ami du peuple vietnamien, notre regretté camarade Jean-Charles Nègre. Je voudrais, si vous le permettez, dédier cette cérémonie à sa mémoire.

Émotion particulière pour nous qui sommes comme vous des « enfants de Ho Chi Minh », qui fut un délégué – ô combien actif et déterminé – du congrès fondateur de notre parti, le PCF, à Tours en 1920 ; puis de son premier Congrès, en 1921, ici à Marseille.

Pourtant, lorsque celui qui se faisait appeler Van Ba toucha pour la première fois le sol de France à Marseille rien ne le prédestinait au destin exceptionnel qui fut le sien.

Comme beaucoup de ses compatriotes, toutes générations confondues, il cherchait la voie de la libération de son peuple. Mais c'était une période particulièrement sombre.

Les résistances armées avaient été vaincues, l'occupant colonialiste, fort de ses militaires, ses gendarmes, ses juges, ses policiers, ses politiciens, ses colons, semblait installé définitivement.

Certains Vietnamiens pensaient trouver la voie de la libération en s'inspirant du Japon ou du mouvement républicain chinois.
Ce ne fut pas le choix du jeune Van Ba : c'est au cœur du système colonial qu'il fallait trouver la faille, en comprendre les mécanismes pour mieux les démanteler.

À son arrivée à Marseille, il y a 110 ans, il ne pouvait évidemment imaginer trouver tout de suite la solution.

Il lui fallut dix années, en parcourant le monde comme employé des Messageries maritimes (MM), en apprenant, en observant, en allant à la rencontre de femmes et d'hommes exploités, et en lisant – énormément.

Au terme de ce parcours qui le mena jusqu'en Afrique de l'Ouest et aux États-Unis, il revint en France mais, entre temps, le monde avait changé : la Première Guerre mondiale avait ébranlé la vieille Europe.

À l'est, Lénine et ses camarades avaient jeté à bas l'Empire tsariste ; et, une nouvelle Internationale, la IIIe, avait proclamé au monde la nécessité de la révolution communiste.

Van Ba adopta alors un nouveau pseudonyme, Nguyen Ai Quoc, que l'on pourrait traduire « Nguyen qui aime sa patrie ».

Aucune contradiction, chez lui, entre ce patriotisme et l'internationalisme : ce sera même le fil rouge de sa vie, et son apport théorique.

En France, un débat passionné, au sein de la gauche socialiste, avait commencé : faut-il rejoindre le communisme ?

Et bien plus tard, Ho Chi Minh racontera avec malice cet épisode, parlant de lui à la 3e personne : « Nguyên écoutait attentivement mais ne saisissait pas le sens d'une foule de termes nouveaux pour lui : capitalisme, classe prolétaire, exploitation, socialisme, révolution utopique, Fourier, Karl Marx, réformisme, anarchisme, production, thèse, antithèse, libération, collectivisme, communisme, objectivisme, subjectivisme, etc. ».

Ho Chi Minh prit part aux débats demandant d'en finir avec les polémiques : tous les socialistes ne militaient-ils pas pour la révolution ? Car, rappela celui qui publiera en 1925 Le procès de la colonisation française : « Pendant que vous passez votre temps à discuter, mes compatriotes, eux, souffrent et meurent ».

La réponse vint. Elle portait un nom, celui de Lénine qui avait mis en évidence que l'alliance des prolétariats et des peuples colonisés était la voie que devait suivre cette révolution mondiale.

Dès lors, le choix du jeune Vietnamien était fait : il serait, indissociablement, un partisan infatigable de la libération de son peuple et un militant du communisme. Et c'est ce choix du congrès de Tours, en décembre 1920 qu'il défendit.

Dans les années qui suivirent, l'attention du PCF aux luttes du peuple vietnamien ne s'est jamais démentie. Lorsque, dans l'entre deux guerres, des révoltes secouèrent le joug colonial, à Yen Bay, dans le Nghe Tinh, lorsque la répression coloniale leur répondit par la guillotine ou l'envoi de milliers de patriotes à Poulo Condor, le PCF, son journal l'Humanité et leurs soutiens et compagnons de lutte menèrent le combat.

Ce furent les appels enflammés de Romain Rolland, d'Henri Barbusse, d'Aragon ; ce furent aussi l'engagement de nos grands dirigeants, Paul Vaillant-Couturier et Gabriel Péri, qui se rendirent sur place, en Indochine, pour dénoncer le système et la répression.

Puis, quand vint l'ère des décolonisations, le PCF et l'Humanité furent au premier rang pour dénoncer la « sale guerre » menée par tous les autres partis politiques et justifiée par la quasi-totalité de la presse.

Les manifestations de jeunes, de femmes pour la paix au Viet Nam ne cessèrent pas. Cela valut aux militants une dure répression : Henri Martin, le marin de la liberté, passa trois années en prison ; Raymonde Dien, qui s'était couchée devant un train chargé d'armes pour en empêcher l'acheminement vers l'Indochine, fut condamnée à un an d'emprisonnement ; tous les dirigeants des Jeunesses communistes (alors UJRF) furent emprisonnés.

Mais le mouvement ouvrier ne se contenta pas de cela : des militants communistes comme Léo Figuères, Jean Marrane ou Pierre Courtade allèrent dans les maquis pour en ramener des témoignages propres à combattre la propagande gouvernementale.

Votre victoire finale, chers camarades, vous la devez d'abord à votre peuple, à votre Parti, à vos dirigeants, toujours sous la direction du président Ho Chi Minh. Mais nous pensons que l'opinion publique française y a joué un certain rôle.

Votre lutte n'était pour autant pas achevée : l'impérialisme américain, autrement plus puissant que le colonialisme français, prit le relais immédiatement après les accords de Genève.

Et la nouvelle épreuve fut plus épouvantable encore.

Durant près de vingt ans, la guerre américaine a labouré la terre du Viet Nam, détruit, rasé les villes, massacré et martyrisé les populations avec les épandages du criminel agent Orange qui fait, aujourd'hui encore, des dégâts humains considérables.

La riposte de l'opinion fut internationale. Une troisième génération de militantes et militants est descendue dans la rue pour exiger la fin de la guerre, le retrait des Américains. Dans ce combat, les communistes français ont tenu toute leur place.

Je rappellerai ici la multitude de manifestations de rues, la collecte monstre qui permit le succès de la campagne « Un bateau pour le Viet Nam », et le voyage de solidarité de Jacques Duclos dans votre pays, en 1968. Et je veux aussi évoquer le nom d'une grande signature de l'Humanité, qui inspira – et inspire encore – le respect et l'affection : celui de Madeleine Riffaud.

Vous avez terrassé le monstre, lui infligeant l'une des pires défaites de son histoire et l'un des plus beaux accomplissements du combat émancipateur du XXe siècle.

Aujourd'hui, le Viet Nam est une puissance qui compte en Asie et sur la scène internationale. Malgré un contexte régional complexe, le Viet Nam devient un pays clé de l'Asie du Sud-Est.

La France semble l'avoir enfin compris et nous nous félicitons du Partenariat stratégique signé entre nos deux pays en 2013 et dont nous fêterons donc le 10e anniversaire dans moins de 2 ans.

Tout comme nous avons tenu à contribuer à l'existence de ce cadre de coopération bilatérale, nous demeurons pleinement engagés dans son approfondissement au service du développement du Viet Nam, de la paix mondiale et de la solidarité entre nos deux peuples.

Chers camarades, chers amis,

En apposant cette plaque commémorative en hommage au président Ho Chi Minh nous avons souhaité souligner l'importance de la part qu'il prit, et de la part prise à travers lui par des femmes et hommes venus du monde entier, luttant pour leurs droits et leur émancipation, aux grandes avancées de l'histoire de France, aux conquêtes politiques et sociales des forces du travail et de la création de notre pays en même temps que de leur patrie.

C'est là l'expression de notre reconnaissance et de notre éternelle admiration.

Merci.