Féminicides : ils osent tout ! Le gouvernement baisse le budget de sa « grande cause »

Trois semaines après le lancement du grenelle des violences conjugales, c’est une semaine particulièrement meurtrière qui vient de s’achever : ce n’est pas moins d’un féminicide tous les jours et demi qui est perpétré à l’heure actuelle.

Le meurtre de Johanna a provoqué un émoi particulier puisqu’il est particulièrement symptomatique de tous les dysfonctionnements que les associations féministes et d’aide aux victimes pointent du doigt, notamment depuis le début de cette année noire. Rappelons les faits : Une première plainte n’a pas été prise lorsqu’elle s’est rendue au commissariat pour dénoncer une gifle reçue au motif que ce n’était pas assez grave. Johanna a dû fuir en sautant de son balcon, pour tenter d’échapper aux menaces au couteau de son conjoint. Malgré une garde à vue, il est rapidement libéré ; selon le parquet les éléments étaient insuffisants pour caractériser l’infraction. Elle rejoint tout de même un CHU avec ses enfants et est assassinée quelques jours plus tard de 14 coups de couteau.

Les mesures d’urgence annoncées par Édouard Philippe le 3 septembre dernier n’ont rien de neuf, rien d’ambitieux et ne sont pas à la hauteur de la gravité du fléau. C’est au final beaucoup de bruit et de communication pour des propositions maigres, voire chimériques.

Parmi ce qui constitue de vraies urgences : l’hébergement ! La date de leur création est toujours inconnue à ce jour, tout comme leur localisation. Sur le fond, le modèle économique reste stupéfiant, 5 millions d’euros pour 1 000 places d’hébergement d’urgence sont techniquement impossible. Rien que pour l’investissement pour 1 000 places, il faudrait compter au moins 10 millions d’euros et ça n’inclut même pas les frais de fonctionnement.

Le gouvernement se démarque aussi par la récupération de dispositifs déjà existants. Doit-on rappeler que la garantie locative existait déjà depuis le 20 janvier 2016 et qu’elle concerne tous les ménages précaires, y compris les étudiants ? Ce n’est donc ni une mesure nouvelle, ni une mesure spécifiquement dédiées aux femmes victimes de violences. Et comme pour l’hébergement d’urgence, le mystère plane encore sur la date de sa mise spécifique pour la mise à l’abri des femmes victimes de violences.

Nous n’avons eu de cesse de rappeler et d’alerter sur les conditions intolérables d’accueil des femmes dans les commissariats. La question principale à évoquer est celle de la formation des personnels, en l’occurrence il ne s’agit que d’appliquer la loi : l’article 51 de la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes du 4 août 2004 prévoit bien le caractère obligatoire de la formation initiale ou continue, selon les corps de métiers, des professionnels au contact des femmes victimes de violences. Mais en plus de la formation, la question et celles des moyens humains et matériels pour les services publics qui doivent accueillir les femmes victimes de violences, APHP, UMJ, police et gendarmerie, services sociaux ! Aujourd’hui, dans les conditions actuelles d’exercices, ces agents de la fonction publique ne peuvent le faire !

La fumisterie se poursuit avec la constitution de 10 groupes de travail mais, dans les faits, des plans quinquennaux avec des objectifs, et mis en place par l’État, existaient déjà avant la nomination de Mme Schiappa, le bilan du dernier aurait dû être fait en cette fin d’année ; peut-être aurons-nous droit un à tweet de la secrétaire d’État mais l’administration n’y travaille plus !

Plus que jamais restons mobilisés

Parmi d’autres mesures sorties du chapeau, Marlène Schiappa a annoncé en grande pompe à terme l’ouverture 24h/24 et 7j/7 du 3919. Alors que nous appelons depuis des mois à cette mesure, seulement 120 000 euros avaient été accordés qui ne permettent de ne prendre que 80 % des appels émis. La date effective de ce fonctionnement n’est pas non plus précisée. Pire, grâce à nos parlementaires, nous venons d’apprendre que les arbitrages du Projet de loi de finances pour 2020 annoncent une baisse du budget du secrétariat d’État à l’Égalité femmes-hommes ! C’est à peine croyable, le gouvernement va baisser le budget de la « grande cause » alors que le Président lui-même, en 2017, avait annoncé qu’il « ne ferait l’objet d’aucune baisse de quel qu’ordre ». Et nous qui attendions une augmentation…

Plus que jamais restons mobilisés, restons aux côtés des victimes, amplifions même notre effort de dévoilement de la situation politique, honteuse pour la France.

Les associations de lutte contre les violences conjugales, le Haut Conseil à l’égalité femmes-hommes et la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains, chiffrent à un milliard d’euros minimum la mise à l’abri et la prise en charge des victimes de violences conjugales. Le Parti communiste partage pleinement cette revendication ! 

Hélène Bidard, responsable nationale de la commission féminisme/droits des femmes