Fabien Roussel au meeting PAIX du Forum européen de Bruxelles

Intervention de Fabien ROUSSEL, secrétaire national du Parti communiste français, au meeting pour la PAIX organisé le samedi 9 novembre lors du Forum européen de Bruxelles.

Cher.e.s ami.e.s, cher.e.s camarades,

Merci de votre invitation à prendre la parole aujourd'hui, sur une question fondamentale parce qu'elle fonde notre conception de la civilisation humaine débarrassée de la domination capitaliste et de ses logiques de concurrence, d’affrontement et de guerre, comme en témoigne l’état réel du monde.

Je m'inscris totalement dans les propos des camarades qui m’ont précédé et que je partage.

Je veux me concentrer sur l'exercice complexe de parler de paix, sans introduire mon propos sur la multitude de guerres ou de menaces de guerre, auxquelles les peuples sont confrontés. Il est évidemment partiel, mais il réfute toute théorisation des réalités et les raccourcis qui renforcent souvent le sentiment d'impuissance.

Et je veux parler de la paix – non comme les dirigeants des pays occidentaux et dans le moule des idées dominantes qui considèrent que «la paix est simplement la non-guerre» voire même «la période entre 2 guerres»

Pour les communistes français.es, la paix est d’abord un projet politique et ne saurait être une simple conséquence d’un monde plus juste et plus fraternel!

Elle est, fondamentalement, le socle des réponses politiques au défi de dépassement du capitalisme mondialisé. Pour nous, paix et communisme vont de pair, ils sont les deux face d’une même pièce du projet de civilisation que nous défendons.

Dans un monde surarmé, dominé par des multinationales qui dictent leur loi aux Etats, gouverné par des institutions, telles le FMI, dédiées à faire perdurer la domination du dollar, ravagé par les logiques de concurrence et de guerre économique, nous communistes français portons avec fierté et détermination un autre projet de société, un nouveau projet de civilisation, à la hauteur des possibilités de notre temps.

A l’opposé des violences des politiques ultralibérales et des poussées nationalistes qui se nourrissent mutuellement, oui, la paix est un projet politique, qui impose l’avènement d’un système respectueux des peuples et de la planète!

Elle exige de placer l'humain au cœur des choix de société et la résolution des facteurs d'insécurité au cœur de l'action.

Elle sous-tend de reconstruire les liens sociaux, à toutes les échelles, sur la base des principes d'égalité et de solidarité, plutôt que de la concurrence et de la compétition.

Elle impose enfin d'apporter des réponses politiques aux inégalités, aux injustices sociales et économiques, plutôt que d’aggraver celles-ci par des réponses répressives, voire militaires, qui ne visent qu’à faire perdurer la loi du plus fort.

Elle est le chemin, souvent le plus ardu mais le plus émancipateur, de réponses politiques durables et justes dans une logique d'émancipation humaine.

Comme je le soulignais dans une récente tribune en France, les mobilisations populaires qui se déroulent depuis plusieurs mois en Amérique latine, mais aussi au Proche-Orient (Liban, Irak) ou en Afrique (Algérie, Soudan) inscrivent de nouveau l'exigence d'un changement profond de modèle de société, à l’échelle de toute la planète. C’est tant mieux et c’est un grand espoir sur lequel il nous faut nous appuyer!

Dans les manifestations réprimées dans le sang au Chili, j’ai vu cette pancarte qui en disait long sur la dimension planétaire cette exigence: «C'est au Chili qu'est né le néolibéralisme, c'est au Chili qu'on l'enterrera!». Oui, ce combat du peuple chilien est celui des peuples contre l'ordre capitaliste, contre ce que mon ami Bernard Thibault nommait cette «3e Guerre mondiale» sociale à l'échelle planétaire, est bien celui pour un nouvel ordre mondial, fondé sur la justice, la fraternité, la liberté et le respect de la planète.

Le combat contre le capitalisme et ses impérialismes, c’est aussi celui du peuple CUBAIN et de ses dirigeants, confronté depuis des décennies à un blocus insupportable, blocus qui entend leur faire payer leur détermination à conduire leur propre expérience, en dehors du joug impérialiste, blocus une nouvelle fois condamné par une très large majorité de l’assemblée générale de l’ONU. Amplifions la mobilisation et la solidarité avec tous ces peuples d’Amérique latine, avec tous ces peuples du monde qui se lèvent contre cet ordre ancien, dévastateur pour les hommes et pour la planète!

Solidarité avec ces peuples mais aussi mobilisation pour nous attaquer, ensemble et à tous les niveaux, aux fondements de ce système, porteur de violence et de guerres. C’est le sens de quelques unes de nos propositions, que nous nous attachons, avec d'autres acteurs politiques et sociaux en France, en Europe et dans le monde, à faire vivre dans l’action.

Je pense à l’exigence d’une COP mondiale contre l'évasion fiscale, pour la justice sociale et fiscale, contre la corruption et pour la réappropriation par les peuples, par les travailleurs des fruits de leur labeur, de leurs richesses nationales, la mise en commun des ressources naturelles au service par exemple de la lutte contre l'insécurité alimentaire (la faim tue chaque jour l'équivalent de 8 fois le 11-Septembre, c'est 6 à 9 millions d'êtres humains par an). Le monde est au bord de la plus grave crise économique et financière de son histoire et ce n’est donc pas un hasard si cette idée fait son chemin, y compris parmi quelques libéraux, effrayés par la catastrophe qui s’annonce.

En Europe, nous proposons une Conférence pan-européenne, associant les citoyens, les travailleurs, les peuples d'Europe pour un nouveau cadre commun de sécurité et de coopération collectives, comme alternative à l'OTAN, dont la dissolution est plus que jamais d’actualité, comme le démontrent les agissements belliqueux de la Turquie et des Etats-Unis, toujours prompts à imposer leur domination par la force. A cette alliance militaire, aux accords de libre-échanges mortifères pour nos pays, opposons une alliance des peuples et des travailleurs de tout le continent, qui permette de travailler à de nouvelles formes de coopération en Europe et avec le reste du monde, par des partenariats d'échanges maîtrisés à l'image de l'accord original entre l'Ue et Cuba. La première décision à l'ouverture de ses travaux pourrait porter sur la signature et la ratification du Traité international d'interdiction des armes nucléaires (TIAN) et de déclarer l'Europe « zone exempte de toute arme nucléaire ».

Et parce que la mondialisation n’a de vices que dans sa volonté de servir les intérêts du capital, donnons lui les vertus de l’émancipation humaine, du respect de la biodiversité, par exemple avec l’exigence d’une conférence multilatérale décisionnaire – sous égide de l'ONU – des pays et des peuples de l'ensemble amazonien, dont l’objectif serait de soustraire ce patrimoine de l'humanité aux appétits des multinationales.

Nous sommes convaincus, enfin, qu’émergent enfin des convergences importantes entre les mobilisations contre le dérèglement climatique et le combat pour la paix, comme l’ont montré les manifestations du 21 septembre. Ces convergences s’appuient en particulier sur la prise de conscience que le capitalisme mondialisé porte aussi en lui, outre la montée des tensions entre les peuples, une exploitation irresponsable et mortifère de nos ressources naturelles. Oui, ce projet d’un monde débarrassé de l’exploitation et de la division entre les hommes et les peuples passe aussi par une révolution écologique, reposant sur de nouveaux modes de production et de développement et sur le respect des écosystèmes. C’est tout le sens de la deuxième édition des Assises de l'Ecologie dont nous voulons faire un événement politique dans notre pays – et auxquelles nous serons très heureux de vous accueillir, à la fin du printemps prochain.

La paix est un combat permanent. Le PCF, fidèle à son histoire, en sera plus que jamais un acteur déterminé, en France, en Europe et dans le monde.