Ingérences américaines en banlieues

Le dernier ouvrage de Patrick Le Hyaric s’intitule « La banlieue porte plainte » (50 pages, éditions de l’Humanité). Ce titre reprend une interpellation de Jack Ralite, maire d’Aubervilliers de 1983 à 2003 : « La banlieue ne se plaint pas, elle porte plainte ». Dans une première partie, le livre évoque l’histoire d’Aubervilliers puis traite de thèmes comme l’insécurité, les inégalités, le logement, la propreté. La seconde partie, « La cité commune : vers une démocratie d’intervention », parle de la citoyenneté, de l’islamisme, de l’égalité et se termine sur ce constat : « C’est le capitalisme qui laisse la République à l’écart ». On trouvera ci-dessous un extrait qui décrit une ingérence peu connue, l’ingérence américaine.

« Un débat s’impose, selon moi, sur la question suivante : comment fait-on, à partir de nos différentes sensibilités, quelles que soient nos convictions religieuses ou philosophiques, pour créer le dépassement du système actuel de telle sorte qu’on construise ensemble une société autre que celle que nous connaissons et que l’on peut, d’ores et déjà, nommer le post-capitalisme ?

Ce débat, il a lieu à Aubervilliers, à La Courneuve, à Argenteuil, Sarcelles, Trappes mais pas dans les quartiers ou les ghettos de riches.

Il y a une chose dont on ne parle jamais. Parlons-en !

Pourquoi des banques américaines comme JP Morgan investissent-

elles 30 millions de dollars en Île-de-France dont l’essentiel en Seine-Saint-Denis ? L’action de JP Morgan est saluée d’ailleurs par l’actuelle ministre du Travail. Celle-ci a déclaré que c’est le moyen de « favoriser l’emploi inclusif pour plus d’habitants de Seine-Saint-Denis grâce à cet ambitieux investissement philanthropique ». Il faut dire que cette somme investie ne représente qu’une petite matinée de bénéfices pour cette banque. D’autres fondations comme celle de la firme Ford, l’International visitor leadership program, les Young Leaders créés en 1981, les jeunes ambassadeurs ou encore la French-American Foundation draguent les jeunes de banlieue, de préférence arabes ou noirs, pour tenter de les intégrer à leur mode de pensée « communautaire » contre les valeurs universalistes de la République française. Particulièrement la valeur de solidarité contre le séparatisme, le chacun pour soi. Plusieurs ambassadeurs américains ont suivi de très près ces recrutements qui ont servi à former des cadres politiques de la droite sur les territoires de la Courneuve, Bobigny, Aubervilliers et ailleurs. Chaque année l’ambassade américaine déverse ainsi 3 millions de dollars dans les banlieues françaises au nom d’une « stratégie d’engagement vers les minorités ». Deux personnes s’y consacrent à plein temps. L’ambassade va même jusqu’à organiser dans ses locaux des ruptures du jeûne pour clore le

Ramadan avec des têtes de pont associatives. Sans compter les Noëls organisés à Sevran ou à Stains, par exemple, où des soldats - des Marines - distribuent des cadeaux aux enfants ! Un câble retrouvé dans les documents dits WikiLeaks du 9 novembre 2005, signé de l’ambassadeur Craig Roberts Stapleton, est intitulé « Le modèle français d’intégration parti en fumée ». Son successeur à ce poste n’a pas hésité à expliquer son projet en travaillant « avec les musées français et les enseignants pour réformer le programme d’histoire enseigné dans les écoles françaises » ; si ce n’est pas de l’ingérence, comment cela pourrait-il s’appeler ? Après cela, on vient accuser les maires communistes ? C’est un voile qu’on veut poser sur les yeux des travailleurs, des créateurs, des démocrates en Seine-Saint-Denis. Des analyses réalisées à partir des résultats des élections municipales à Bobigny par des experts, qui sont loin de mes opinions, montrent que la droite gagne la ville en mobilisant ces réseaux-là, en utilisant les techniques américaines dites du « community-organizing » et de ce que les Américains appellent le « community management », largement utilisées à cette occasion en mobilisant des « communautés » financées de l’extérieur, y compris dans le sport comme le kick-boxing. Pourquoi tout ceci est-il caché ? Si ce n’est, en la circonstance, à des fins anti-progressistes et antirépublicaines de propagande électorale ! »