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Les manifestations sont désormais quotidiennes en Iran renouant avec le mouvement de 2019. La corruption, la prédation des couches dirigeantes mais aussi les sanctions américaines ont plongé le pays dans la faillite. L’embargo total sur les ventes de pétrole ont asséché les exportations réduisant d’un tiers les recettes budgétaires. L’inflation atteint 40 % sur un an (60 % sur les produits alimentaires), la monnaie nationale s’est effondrée provoquant la ruine des couches moyenne, une explosion de la précarité et de la misère. 45 % des Iraniens vivent désormais sous le seuil de pauvreté. Les investissements, notamment dans le secteur pétrolier et gazier ont été stoppés alors qu’il devient de plus en plus difficile de payer les fonctionnaires dans la mesure où les caisses de l’État sont vides.

Dans ce contexte de débâcle, le gouvernement iranien a annoncé la suppression des subventions sur les produits de base et les médicaments. Ces décisions brutales ainsi que l’effondrement récent d’un immeuble, symbole des turpitudes des représentants du pouvoir, viennent de mettre le feu aux poudres.

La répression des mobilisations récentes, qui expriment une perte confiance dans les institutions comme en témoigne la forte abstention électorale, ont déjà fait six victimes et des centaines de personnes ont été arrêtées.

Si la responsabilité de la situation présente incombe aux dirigeants iraniens, il est indéniable que, sur le plan macroéconomique, les sanctions américaines pèsent lourd depuis que l’accord international sur le nucléaire iranien a été dénoncé par Donald Trump.

Le scandaleux principe d’extraterritorialité demeure une arme puissante. Les négociations ont été relancées à Vienne avec l’administration de Joe Biden mais s’éternisent autour de facteurs de blocage avec, notamment, l’exigence de sortir les pasdarans de la liste des organisations terroristes. En renonçant à l’arme atomique, l’Iran souhaite un accord qui préserve sa souveraineté face aux défis intérieurs et régionaux.

D’autres éléments perturbent cette nouvelle ratification. Israël multiplie les provocations (assassinats de dirigeants iraniens et bombardements de la force Al Qods en Syrie) afin d’entraver le processus.

De plus, avec la guerre en Ukraine, la Russie n’a plus intérêt à sa ratification afin de contrer la concurrence du pétrole iranien. Quoi qu’il en soit, chaque jour sans accord rend la situation plus dangereuse. L’accord économique récent adopté avec la Chine ne compensera nullement la perte des achats d’hydrocarbures par les Occidentaux d’autant que ce partenariat suscite déjà de fortes réticences dans la population.

Le monde et le peuple iranien ont besoin d’un accord sur le nucléaire, ce qui constituerait une bonne nouvelle dans ce contexte de guerre. La France doit y prendre sa part en évitant les surenchères qui ont pu prévaloir dans le passé.

Pascal Torre
responsable-adjoint du secteur international
chargé du Maghreb et du Moyen-Orient