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L’expression « l’heure est grave » est une figure rhétorique galvaudée, mais je ne trouve pas mieux pour caractériser les moments que nous vivons.

La guerre consécutive à l’agression de l’Ukraine par la Russie va entrer dans quelques jours dans son neuvième mois sans perspective de cessez-le-feu ou de cycle de négociations. Plus grave, l’escalade est la chose la mieux partagée des belligérants. Au discours du président russe Vladimir Poutine qui laisse entendre ou plus exactement peut être interprété comme une menace d’utilisation des armes nucléaires, la réponse du président américain Joe Biden a été de dire qu’il craint « l’apocalypse ». Pas un mot pour suggérer qu’il utilisera les moyens à sa disposition pour éloigner un tel spectre.

Nous sommes dans une configuration que le monde n’a pas connue depuis plus d’un demi-siècle avec des armes plus sophistiquées et potentiellement plus meurtrières. Les opinions publiques en Russie et en Ukraine, dopées par la propagande de guerre, ne voient majoritairement la fin du conflit que dans la reddition du camp d’en face. Sur le terrain, vu le rapport de forces, une telle perspective est impossible. Seuls un cessez-le-feu et une négociation prenant comme point de départ les accords de Minsk pourraient fournir un début sérieux de sortie de crise. Malheureusement, loin de calmer les ardeurs bellicistes l’escalade actuelle amène les acteurs sur des positions maximalistes.

Depuis le 24 février 2022, l’Union européenne (UE), parmi d’autres, s’est montrée solidaire de l’Ukraine et a condamné, sans ambiguïté, la guerre d’agression que la Russie lui mène. Nous aurions aimé — il n’est jamais trop tard — qu’elle le fasse vis-à-vis d’autres conflits, d’autres pays. Elle a pris des sanctions contre la Russie montrant ainsi qu’elle ne faisait aucun compromis avec la politique de la force et du fait accompli. Depuis le début de la guerre, les diverses initiatives diplomatiques européennes ne peuvent atteindre leur pleine efficacité, car elles ne s’affranchissent pas de la logique atlantiste. Les Européens laissent ainsi la place à d’autres acteurs comme la Chine et la Turquie, par exemple, qui sont d’un poids important sur les décisions des protagonistes du conflit. À la vue de la tournure que prend la guerre, il est pourtant plus que temps que les pays de l’UE assument un rôle de paix, plutôt que de se lancer dans une course effrénée à l’armement avec du matériel américain comme le fait l’Allemagne.

En tant que voisins des belligérants, amis ainsi que partenaires jusqu’à une récente date, de toutes les parties au conflit et victime des contrecoups de la guerre, les pays européens ont voix au chapitre et doivent utiliser leur influence pour aller dans le sens de la recherche de la paix. Celle qui ouvre des négociations pour garantir la sécurité paneuropéenne, dépassant les carcans des alliances militaires. Il est urgent de trouver une issue pour l’intégrité de l’Ukraine et de ses populations dans l’esprit des accords de Minsk. Des avancées sont possibles comme l’a montré récemment l’accord entre l’Ukraine et la Russie destiné à ouvrir et sécuriser les routes maritimes pour les exportations de blé.

Depuis plusieurs mois, les militants communistes avec d’autres forces pacifiques en France, en Europe et à travers le monde tentent de faire entonner par tous un « hymne à la paix » pour un cessez-le-feu et contre l’extension du conflit. Il y a peu d’échos en ce moment. Mais face au danger, et alors que se déroule de part et d’autre une campagne d’opinion de banalisation de l’arme nucléaire et de l’escalade, il est certain que dans les jours et semaines à venir, les mobilisations iront crescendo. Faisons entendre l’urgence de former une grande coalition pour la paix qui inscrit son action dans l’agenda européen et du monde.


Félix Atchadé
Collectif Afrique du PCF
membre de la Commission des relations internationales