Les nouveaux médias, les jeunes et la politique

41% des 18/24 ans ne se sont pas déplacés pour voter au premier tour de la présidentielle. Pour autant cela signifie-t-il que les jeunes se désintéressent de la politique ?

Les 18-24 ans sont 76 % à s’informer sur les réseaux sociaux. Qu’y recherchent-ils ? Pourquoi les politiques investissent-ils désormais ces réseaux appelés Twitch, Tik Tok, Brut, Snapchat, Clubhouse ? Il faut-être présent dans ces médias qui forment les esprits à travers des jeux qui peuvent passer des messages politiques.

En visant la jeunesse et leurs réseaux sociaux, les politiques peuvent faire coup double, s’adresser à eux pour avoir leur vote mais aussi pour montrer qu’ils sont sensibles aux jeunes.

En 2020, TikTok, plateforme lancée en 2016 par le groupe chinois ByteDance, est devenue l’application la plus téléchargée au monde, 850 millions d’utilisateurs mensuels. Diffusion de vidéos courtes, rythmées, musicales, humoristiques, effets spéciaux faciles à utiliser.

Pour LREM, le recours à des stars du web fait désormais système. Dès l’été 2019, Attal, secrétaire d’État à la jeunesse, avait noué des partenariats avec plusieurs comptes pour faire la promotion du Service national universel, un compte suivi par 8 millions d’abonnés. Sur un autre site, un clip sur les gestes barrières réalisé à la demande de Macron, avait totalisé 11 millions de vues en 3 jours.

Depuis l’automne 2020, Attal, se prête chaque dimanche à l’exercice avec des influenceurs qui comptent 1 million d’abonnés.

Attal, a lancé le 24 février 2021 sur Twitch, en streaming (le streaming permet la lecture d’un flux audio ou video, au fur et à mesure qu’il est diffusé), une émission mensuelle d’échanges durant une heure, intitulée Sans Filtre. Il débriefe les conseils des ministres sans journalistes et sans contradicteurs.

Après les manifestations contre le pass sanitaire, Macron, s’adressait aux jeunes par vidéo sur Instagram et Tik Tok, répondant directement aux questions.    Un million de vues en une après-midi, 49 millions cinq jours plus tard.

Le service public audiovisuel s’y est mis depuis mars 2021 sur Twitch, où chacun peut diffuser ses vidéos. Hollande invité du journaliste de France info, Samuel Etienne, avait totalisé 650 mille replay, pour un échange de 2 h 30 avec les seules questions du chat. Depuis, après certaines émissions, comme le 20 h de France2, l’internaute peut continuer la discussion avec l’invité.

Un des derniers nés de ces réseaux, Discord, logiciel gratuit de messagerie instantanée,

permet d’échanger à l’écrit, à l’oral, de partager des documents, d’organiser des visioconférences et des formations grâce au partage d’écran. Tout cela en accès depuis un navigateur, un smartphone ou un ordinateur. Discord a été utilisé par l’équipe de campagne de Fabien Rousssel et par les militants. J’ai pu constater son efficacité.

On verra dans les mois et années à venir ce que dira de ces réseaux l’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) qui depuis le 1er janvier a remplacé le CSA.

L’influence de ces réseaux inquiète au plus haut niveau des États. Fin 2019, Trump avait tenté d’interdire Tik Tok, l’accusant d’espionner pour le compte de Pékin. Biden a demandé à son administration d’enquêter sur les risques de ces applications détenues par des puissances étrangères. Le 29 mai 2021, la Commission européenne lançait une action à l’encontre du réseau, accusé de recourir à des publicités ciblant les enfants.

Quels bénéfices pour les politiques ?

Pas de contradictoire, ils parlent directement aux internautes. Leurs interventions sont reprises dans les journaux télévisés. Ces réseaux sont perçus comme moins agressifs qu’un échange avec un journaliste, avec un public bienveillant, moins politisé. C’est la réactivation du mythe de la démocratie directe.

De plus, si vous vous inscrivez en premier sur une plateforme émergente, votre communauté sera la première à s’y implanter et à fédérer.

Mais ce que vous gagnez en proximité, en chalandise, vous le perdez en sacralité, en autorité reconnue, avec une gadgétisation du langage politique.

Ces réseaux sont en tout cas devenus des caisses de résonance stratégique dont les politiques peuvent difficilement se passer, car une campagne se joue aussi sur ces réseaux.

Jean-François Téaldi 

 

Retrouvez la Vidéo de cette table ronde-débat organisée à Nice par Les Amis de la liberté, mon exposé complet, les témoignages de 4 JC utilisateurs et le débat avec la salle) : les-nouveaux-medias-les-jeunes-et-la-politique : 

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