Macron, au secours du Capital

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Le discours du 12 Mars 2020 en a interrogé plus d’un : Macron dont la politique économique n’a consisté qu’à vendre les services publics et la Sécurité sociale au marché a-t-il changé ?

En effet, un peu à la manière d’un mea culpa, il confie : « Ce que révèle d’ores et déjà cette pandémie, c’est que la santé gratuite sans condition de revenu, de parcours ou de profession, notre Etat-providence ne sont pas des coûts ou des charges mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe. Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. » Et d’ajouter «Nous défendrons l’ensemble des travailleurs et des travailleuses ». Son discours semble alors un plébiscite à la science, à la solidarité, à l’intérêt collectif.

Alors notre président délaisse-t-il la logique du capital pour promouvoir un monde en commun et se placer du côté des travailleurs ?

La priorité du gouvernement, ce n’est pas les services publics

            Pour faire face aux conséquences de la crise économique, sanitaire et sociale, le gouvernement a annoncé 45 milliards d’euros d’investissement dont 35 milliards sont absorbés par des reports des impôts et cotisations sociales pour les entreprises. De plus, le gouvernement annonce qu’il apportera, par l’intermédiaire de BPI France, 300 milliards de garanties à des prêts bancaires aux entreprises en difficultés. Parallèlement, le MEDEF se dit favorable à une nationalisation des entreprises en grande difficulté

Attention, les moyens de l’État doivent permettre aux entreprises de continuer à produire malgré la crise, pas à alimenter les profits !

            – La baisse des cotisations sociales, qui constitue la base de financement de la Sécurité sociale, va encore plus miner le système de santé et la capacité des travailleurs à se soigner en pleine crise sanitaire !  D’autant plus si le gouvernement accepte de nationaliser les pertes des entreprises !

            – Ces 45 milliards d’urgence ou ces 300 milliards de crédits ne sont conditionnées à aucun critère (le maintien ou la création d’emploi, la préservation de l’environnement, etc) : toutes les entreprises confondues pourront y avoir droit et pourront en faire ce qu’elles entendent.

            Et les services publics, et en particulier les services de santé ? Aucune annonce d’investissements d’envergure pour reconstruire l’hôpital (qui a perdu 57 000 lits en hospitalisation complète rien qu’entre 2003 et 2015[1]), d’augmentation de salaires pour « nos héros en blouse blanche » ou la garantie de leurs pensions de retraite. L’ambition du gouvernement se limite à acheter des masques à l’étranger (étant donné que les usines de production ont fermé en France et que la réserve de masques a été divisé en trois depuis 2013[2]). Aucun moyen non plus pour les enseignants, les pompiers, etc.

Faire payer la crise aux travailleurs :  

Que dit la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 ? Adoptée par le Parlement dimanche 22 mars 2020, c’est une vraie bombe sur les droits des travailleurs :

  • Elle autorise les l’employeur à imposer des congés payés et RTT pendant la période de confinement.
  • Elle permet aux entreprises de secteurs particulièrement nécessaires à la Sécurité de la Nation ou à la continuité de la vie économique et sociale  de déroger aux règles relatives à la durée du travail et au repos dominical. Le 24 Avril, dans la foulée, une dépêche de l’AFP annonçait que cela pourrait aller jusqu’à 60h/semaine dans certains secteurs : Transport, énergie, agroalimentaire, télécoms et logistique par exemple.
  • Le gouvernement garantit que les aides aux entreprises permettront de limiter le recours aux licenciements, mais comme nous l’avons dit plus haut, aucun critère, ne serait-ce que le maintien des emplois, n’est exigé pour recevoir les aides.
  • Aucune garantie pour les intérimaires, saisonniers, travailleurs à domicile et intermittents de bénéficier des 90% de leur salaire brut comme cela est garanti pour le chômage partiel.
  • AUCUNE limite dans le temps à la validité de ces mesures : le mot « provisoire » qui figurait dans le projet de loi initial, a été supprimé sur projet de loi adoptée.

Tout le monde doit faire des efforts dans une « union nationale » contre la crise ? Les sacrifices, pour notre gouvernement, ce sont les travailleurs qui doivent les faire.

Travail gratuit, don de RTT, augmentation du temps de travail, etc. Les attaques aux droits des travailleurs sont sans précédent, tandis que Bruno le Maire demande timidement aux entreprises « de ne pas trop verser de dividendes ». Deux poids, deux mesures.

Non, Emmanuel Macron n’est pas devenu de gauche. Si le risque de récession est bien réel, il n’est pas « naturel » que ce soient les travailleurs qui payent, c’est une politique de classe. Pour éviter la crise : attaquons le capital !


[1] Insee d’après les données de la DREES https://www.epsilon.insee.fr/jspui/bitstream/1/61957/1/panoramasante_eta_2017.pdf?fbclid=IwAR3gypo8X2p3fhRpDvCJdOxj-SX9Cy3AG2ZPAUwczni_le5cO8BI_hl3jsU

[2] Rapport du Sénat https://www.senat.fr/rap/r08-388/r08-38826.html