Ocean Viking : instrumentalisation politique et hypocrisie !

Après 20 jours d’errance, le bateau Ocean Viking de l’ONG SOS Méditerranée a accosté à Toulon sous escorte militaire, avec une nouveauté pour essayer d’éviter l’application des règles de Dublin venue de l’imagination sécuritaire du ministre de l’Intérieur, M. Darmanin.

En effet, la création d’une zone internationale sur le périmètre du centre de vacances de la presqu’île de Gien où les rescapés « du naufrage » ont été provisoirement hébergés permet au gouvernement Macron de dire que ce n’est pas la France le pays d’accueil. Les réfugiés « enfermés » dans ce centre de vacances ont 26 jours maximum pour faire valoir leur droit , leur demande d’asile, faire entendre leur parcours de migrations, leur besoin de protection et tout cela après avoir évité le naufrage en pleine Méditerranée et sûrement des choses encore plus atroces dans leur parcours migratoire.

Alors, la première chose à dire est bravo à SOS Méditerranée qui continue inlassablement, et cela malgré les pressions, malgré l’instrumentalisation politique des grandes démocraties européennes de continuer à sauver des vies et à respecter le droit maritime.

En revanche, l’hypocrisie de la France est scandaleuse. La France serait incapable d’accueillir dignement 234 réfugiés qui fuient, en effet, la guerre, la misère, les discriminations, la violence… qui cherchent un endroit pour construire une vie et faire vivre leur famille.

Rappelons qu’en 2018, la France avait refusé d’accueillir l’Aquarius. Rappelons que depuis 2014, plus de 20 000 personnes ont perdu la vie en Méditerranée centrale. Tous les gouvernements négligent cette situation que l’Europe a les moyens de résoudre.

Ce sont bien cette instrumentalisation politique, cette hypocrisie, ce discours purement sécuritaire des questions migratoires, le non-respect du droit international qui nourrissent les extrêmes droites en France, en Europe et dans le monde.

Le drame de cette situation n’est pas pour la France ou l’Europe mais bien pour ces réfugiés obligés de prendre des risques incroyables, de payer des passeurs voyous et mafieux pour espérer vivre. Et cela parce que les responsables politiques en France, en Europe n’ont pas le courage de se mettre autour d’une table pour sortir de leur politique d’Europe forteresse et ouvrir le débat sur les voies légales et sécurisées, ouvrir le débat sur les questions de protection des réfugiés.

Nous avons sans aucun doute besoin d’une plateforme de 1er accueil coordonnée par l’Union européenne avec un mécanisme de « répartition » solidaire. Nous avons besoin de bateaux de sauvetage européens pour les urgences de ce type et éviter les images et les « coups de menton hypocrite » des deux gouvernements comme cela a été le cas une nouvelle fois pour ce bateau.

Mais nous avons surtout besoin de courage politique pour parler de liberté de circulation, de liberté d’installation, d’égalité des droits, de voies légales et sécurisées, de la protection des réfugiés climatiques, de régularisation des sans-papiers.

Cécile Dumas
responsable adjointe du secteur International
chargée des questions migratoires