Tour de France des entreprises

Les communistes ont décidé, lors de leur dernier congrès, de relancer leur activité à l’entreprise et sur les lieux de travail. Et pour cause ! Les ordonnances Macron sont venues prolonger un cycle de 4 réformes (ANI en 2013, lois Macron et Rebsamen en 2015, Loi El Khomri en 2016) et affaiblir tout ce qui encadre la vie au travail de 17 millions de salariés de droit privé… jusqu’aux instances de décisions elles-mêmes avec les nouveaux CSE (Comité Social et Économique) remplaçant le CE (comité d’entreprise) et les CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Et c’est une réforme toute aussi néfaste qui a été publiée au cœur de l’été concernant la fonction publique. Pendant ce temps, le pays est frappé par une nouvelle vague de déstructuration du tissu industriel national.

Face à cette offensive d’ampleur contre les droits des travailleurs, à la veille d’une réforme visant à en finir avec la retraite par répartition, nous voulons résister et construire avec le monde du travail la riposte nécessaire. C’est tout le sens du « tour de France des entreprises » entamé par le secrétaire national du PCF. Débuté cet été à General Electric Belfort, le député communiste s’est ensuite rendu à la centrale thermique de Gardanne que le gouvernement veut fermer sans même expérimenter le projet de transition écologique porté par les salariés et leurs syndicats. A la veille de la rentrée, c’est avec tout le tissu économique mis en difficulté par la fermeture de la ligne de fret ferroviaire Perpignan-Rungis et son train primeur qui a reçu la visite d’une délégation d’élus communistes et de syndicalistes cheminots.

Une douzaine d’autres déplacements sont prévus, dans le Sud-Ouest, le Nord ou l’Est, à la rencontre des ouvriers de Getrag, sur le site industriel où l’usine Ford de Blanquefort a fermé, de ceux de Bridgestone dans le Pas-de-Calais, des Pont-à-Mousson en Lorraine, les agents des services publics de proximité en Isère ou encore d’une coopérative agricole auvergnate. 

Oui, nous voulons nous confronter au travail dans tous ses états en partant à la rencontre des salarié·e·s dans leurs entreprises pour se confronter à la réalité de vie des quelque 27 millions d’actifs occupés que compte le pays. D’autant que les grands gains de productivités commencés dans les années 80 et prolongés par la révolution informationnelle comme les externalisations, l’explosion de la sous-traitance, l’ubérisation ont profondément changé la nature du travail comme sa perception par les salariés eux-mêmes.

À droite comme à gauche, beaucoup ont théorisé l’idée selon laquelle l’entreprise ne serait plus un lieu de socialisation politique. Nous pensons exactement l’inverse. « Lieu de pouvoir sur l’économie, la société et la vie quotidienne, c’est aussi un lieu où le patronat peut imposer ses idées. Un lieu où se forge un vécu d’expériences et des mentalités sur lesquelles peuvent s’imposer les idées dominantes comme se construire une conscience de classe », énonce le texte adopté au 38e congrès.

Sans rester inactifs, malgré une implantation persistante de structures de proximité à l’entreprise ou encore des réseaux rassemblant des communistes d’un même secteur d’activité, avec des productions théoriques importantes dans nos revues, de nombreux communistes estiment que notre action est à ce jour insuffisante. Pour avancer, le conseil national du 12 octobre organisera une part importante de ses travaux au travail et à l’activité à l’entreprise. En agissant sur deux leviers : l’analyse et l’élaboration de propositions à la hauteur de la réalité du travail au XXIe siècle comme l’état des lieux structurel de notre implantation à l’entreprise et son renforcement.

Bien sûr, il ne suffira pas d’une réunion place du Colonel-Fabien pour répondre à des enjeux considérables. Notre objectif est d’engager un travail de reconquête au long cours. Il s’appuiera sur le tour de France des entreprises du secrétaire national, sur la grande bataille qui s’ouvre avec la réforme des retraites, sur la participation au débat du plus grand nombre de communistes, sur des auditions de scientifiques, d’intellectuels, de syndicalistes. Il pourra, enfin, marquer une étape importante avec une convention nationale à l’automne 2020 sur les entreprises et les lieux de travail. 

Aymeric Seassau, membre du CEN.