Un programme pour les luttes et pour la France

Nous vivons un moment aussi grave qu’exceptionnel. La crise sanitaire a révélé celle, globale, du capitalisme mondialisé et financiarisé. Pour la deuxième fois depuis la secousse de 2007-2008, le modèle néolibéral, qui s’est imposé à la planète depuis la fin des années 1970, révèle sa faillite.

Le capital répondant à ce contexte par la volonté d’en faire payer le coût au monde du travail et au peuple, nous sommes confrontés à la menace d’un véritable tsunami social. Avec des plans de licenciements en série portant le chômage de masse à des niveaux inégalés depuis longtemps, la précarisation accentuée de tout un pan de la société, la montée des inégalités, des discriminations, du racisme, de la répression.

La question posée n’est, par conséquent, pas celle du « monde d’après », mais celle… du système d’après. Se hisser à la hauteur d’un tel enjeu de civilisation, telle est l’ambition du projet de programme, dont s’est doté le PCF et que résume son titre : « Construisons la France en commun, formons une union populaire agissante ».

Ce document n’est pas une plateforme électorale, ni une esquisse de programme de gouvernement. C’est une autre démarche qui l’inspire : partir des objectifs et des besoins immédiats que la crise actuelle fait apparaître — en matière de santé, d’éducation, de salaires, de lutte contre la pauvreté ou de l’exigence de droits nouveaux — pour montrer pratiquement que l’on ne peut aborder ces urgences sans des mesures radicales, qui vont à la racine des problèmes, en l’occurrence la domination du capital, l’utilisation de l’argent, les pouvoirs grâce auxquels la classe possédante impose sa loi à l’immense majorité. À partir de là, il s’emploie à montrer en quoi l’exigence de ruptures immédiates ouvre la voie au projet de rupture avec les logiques dominantes que nous voulons proposer au pays. Dit autrement, il s’agit de mettre en lumière que c’est être tout simplement réaliste que d’affirmer une volonté de changement révolutionnaire.

L’originalité de la démarche consiste donc à mettre en débat un programme de lutte qui est, en même temps, un programme pour la France. Elle veut nourrir d’un contenu porteur d’espoir les mobilisations immédiatement indispensables pour faire face aux désastres, sociaux et écologiques, que génère l’ordre dominant, aidant ainsi à ce que tous ces combats débouchent, de l’échelon territorial jusqu’au plan national, sur des conquêtes changeant concrètement les rapports de force.

Plus précisément, l’objectif est de restituer, auprès de celles et ceux qui liront nos propositions, la cohérence de l’action des communistes. Jusqu’à la solution politique à travers laquelle ils appellent à changer la gauche : cette union populaire agissante qui ne saurait voir le jour à partir seulement de débats de sommet ou d’échanges entre organisations, mais doit résulter, si elle veut enclencher une véritable dynamique transformatrice, de l’intervention directe des acteurs du mouvement social, des citoyens, de la jeunesse.

Le plan choisi découle de l’approche. Il décrit d’abord les enjeux du tournant de situation. Puis il développe les solutions d’urgence exceptionnelles qu’appellent l’état désastreux maintenu de notre système de santé (en dépit des annonces du « Ségur » de la santé), une rentrée scolaire si chaotique qu’elle menace le devenir même de l’école de la République, des inégalités et des violences qui se sont développées au gré de la crise sanitaire, et depuis. Il s’efforce enfin de dessiner à grands traits l’exigence d’un autre modèle de développement.

Notre spécificité, dans ce cadre, concerne d’abord la manière dont notre proposition de sécurité-emploi-formation cherche à répondre aux aspirations à la sécurisation de tous les moments de la vie, telles qu’elles montent de la société et des luttes : elle sera, en cette rentrée, au centre de la bataille que nous initions pour l’emploi, avec les rendez-vous départementaux du 10 octobre comme premiers rendez-vous. Ou la place centrale que nous donnons aux services publics, comme leviers d’un changement global de logique. Ou encore l’articulation que nous nous employons à construire entre l’indispensable transition écologique, le besoin d’un autre mode de production et de consommation, et la reconquête industrielle si déterminante pour l’avenir du pays. Ou encore notre appel à restaurer la souveraineté nationale et populaire, pour favoriser de nouvelles coopérations solidaires, en Europe et dans le monde. Ou les moyens que nous avançons pour prendre le pouvoir sur l’argent, changer les règles de la fiscalité, s’approprier les grands moyens de production et échange à l’aide notamment de nationalisations d’une nouvelle sorte, constituer un pôle financier et bancaire public afin de réorienter le crédit au service du développement humain. Ou, enfin, les nouveaux pouvoirs et institutions démocratiques qui, de l’entreprise à l’État, doivent permettre aux salariés et aux citoyens de décider enfin du destin collectif. Afin de se débarrasser de toutes les dominations, qu’elles soient patronale, patriarcale ou raciste…

Ce programme a vocation à être défendu dans l’ensemble des échéances politiques. Il ne se veut pas toutefois un produit achevé. C’est pourquoi nous le mettons en débat et appelons les communistes, autant que celles et ceux qui souhaiteront y contribuer, à l’enrichir de leurs réflexions et expériences. C’est l’objet de la plateforme participative aujourd’hui mise à disposition. À chacune et chacun de s’en saisir, pour engager le débat avec nos concitoyens et construire, avec eux, une société qui mette l’humain et la planète au cœur de tous les choix.

Christian Picquet, membre du Comité exécutif national, responsable Mouvement des idées, intellectuel·le·s.